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Le Monde/AFP
L’opération « Wuambushu » a débuté à Mayotte après un mois de suspension
#Mayotte #sanspapiers #Uwambushu #Darmanin #expulsions
Article mis en ligne le 23 mai 2023
dernière modification le 22 mai 2023

Dénoncée comme « brutale », « anti-pauvres » et violant les droits des migrants par des associations, l’opération visant à détruire les bidonvilles et à expulser leurs habitants vers les Comores était quasi au point mort depuis son lancement il y a près d’un mois.

Suspendue il y a un mois par le tribunal judiciaire de Mamoudzou, l’opération « Wuambushu » (« reprise », en mahorais) a finalement débuté. Les autorités françaises ont commencé, lundi 22 mai, la démolition d’un vaste bidonville à Mayotte.

Ce « décasage » a commencé vers 7 h 30 locales (6 h 30 à Paris) dans le quartier de Majicavo, sur la commune de Koungou (nord). Les pelleteuses sont entrées en action pour démolir les cases en tôle insalubres de Talus 2, l’un des plus importants bidonvilles de ce territoire français de l’océan Indien, département le plus pauvre de France, ont constaté des journalistes de l’Agence France-Presse (AFP).

Tôt lundi matin, des gendarmes équipés de pied de biche sont entrés dans les habitations pour vérifier que personne ne se trouvait à l’intérieur avant le début des démolitions, selon des journalistes de l’AFP sur place. L’électricité et l’eau ont été coupées. (...)

Un millier de logements insalubres détruits sur plusieurs mois

La démolition de Talus 2, qui mobilisait lundi environ 200 personnes, dont 150 gendarmes, « devrait durer toute la semaine », selon Psylvia Dewas, chargée de la résorption de l’habitat illégal à la préfecture de Mayotte. Au total, les autorités françaises prévoient de détruire un millier de logements insalubres à Mayotte sur plusieurs mois, dans une quinzaine de périmètres. (...)

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 (Infomigrants)
"En finir avec les bidonvilles" : à Mayotte, les habitants confrontés à l’opération Wuambushu

(...) La destruction du quartier de "Talus 2" est la vitrine de l’opération Wuambushu, voulue par le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, pour réduire l’habitat insalubre, lutter contre la délinquance et expulser les migrants en situation irrégulière, pour la plupart venus de l’archipel voisin des Comores. Un demi-millier de policiers et gendarmes français ont été mobilisés pour l’occasion. (...)

"On trouvera un endroit pour dormir dehors provisoirement"

Le "décasage" de "Talus 2", qui mobilisait lundi environ 200 personnes, dont 150 gendarmes, "devrait durer toute la semaine", a indiqué à l’AFP Psylvia Dewas, chargée de la résorption de l’habitat illégal à la préfecture de Mayotte.

Les services de l’État ont dénombré "162 cases à démolir" dans ce bidonville, a précisé le préfet, Thierry Suquet. (...)

« Wuambushu » est dénoncée comme « brutale », « anti-pauvres » et violant les droits des migrants par des associations, mais soutenue par les élus et de nombreux habitants mahorais. (...)

Plusieurs personnes avaient, dès dimanche, détruit elles-mêmes leurs habitations. "Ça, c’est ma maison. J’ai cassé moi-même ma maison parce que le préfet a cassé ma vie", a dit un homme âgé au journaliste Cyril Castelliti, en reportage à Mayotte. L’homme, de nationalité française, a reçu une proposition de relogement. (...)

Mais comme beaucoup d’autres, il a refusé en raison notamment de l’éloignement géographique. "On nous donne une maison mais de l’autre côté de l’île", s’est plaint un autre habitant à France 24. "Il vaut mieux qu’on reste ici. Avec les enfants et la famille, on trouvera un endroit pour dormir dehors provisoirement".

Marteau et pince coupante à la main dimanche pour démonter la tôle de sa case, Ahmed Daoud, 50 ans, avait raconté à l’AFP que les autorités lui avaient proposé un relogement à Chembenyoumba, à l’autre bout de l’île. "Je préfère qu’on reste ici, que les enfants continuent d’aller à l’école. On peut dormir sur la terrasse", soupirait cet homme de 50 ans, en situation régulière à Mayotte. (...)

Les personnes relogées ne semblent pas non plus satisfaites. Un homme montre à un journaliste de l’AFP sa nouvelle habitation. "Je l’ai pris mais ce n’est pas un logement. Il n’y a pas de pièces, regardez ! Comment je vis ici avec ma femme et mes enfants ? Où est-ce qu’on dort ?", s’emporte-t-il devant la porte.

Selon le préfet, "la moitié des familles qui vivaient à dans ce quartier "ont été relogées".
Des habitants en larmes

Au total, les autorités prévoient de détruire un millier de logements insalubres à Mayotte sur plusieurs mois, dans une quinzaine de zones.

"L’objectif est d’en finir avec les bidonvilles à Mayotte", a martelé Thierry Suquet, décrivant "une situation insupportable" pour les personnes qui habitent dans ces quartiers, "dont la vie est en danger". (...)

Cette opération est un crève-cœur pour les habitants du bidonville, dont beaucoup y vivent depuis des années. Fatima Youssouf, l’une des doyennes du quartier, a attendu le dernier moment pour quitter sa maison en dur, dans laquelle elle a "investi toutes ses économies".

Son mari, mahorais, qui travaille pour la société de démolition Tetrama, a été mobilisé pour l’opération. Devant la maison de sa mère, il a perdu connaissance avant d’être évacué vers l’hôpital. (...)

Même état d’esprit pour cette habitante de nationalité française, au micro du journaliste Cyril Castelliti : "Ça fait mal, j’ai pleuré, mon petit frère est en train de pleurer. J’ai grandi là. Depuis que je suis née, je suis là. C’est ça l’avenir de Mayotte ? Après, ils vont dire qu’il y a des délinquants alors que c’est à cause d’eux !"