PornHub ne manque pas d’imagination, en témoigne le genre « Nature porn » disponible sur la plateforme de streaming dédiée à la pornographie.
Plusieurs campagnes marketing ont été menées pour sauver des espèces à travers le visionnage de leur vidéos (comme les abeilles, en Avril 2019). L’intérêt que PornHub porte à la biodiversité soulève une question de taille : quel est le rapport entre la pornographie et l’apiculture ?
Le capitalisme vert n’a qu’une seule fonction : masquer les dégâts du capitalisme. Alors, que cherche à masquer PornHub ? Quel est réellement l’impact écologique de la pornographie ?
Les actions en faveur de la biodiversité entreprises par PornHub sont diverses et ne manquent pas d’originalité ! (...)
La campagne « Trop de sexe peut être une mauvaise chose » s’attaque à la surpopulation dans les refuges pour animaux abandonnés.
Toutes les 2 000 vidéos visionnées, PornHub donne un centime à l’association PETA.
Encore une fois, l’entreprise donne des conseils aux internautes. Le principal conseil étant de regarder des vidéos sur leur plateforme entre le 7 et le 31 juillet…
Petit calcul : PornHub annonce qu’en 2018, 207 405 vidéos sont regardées chaque minute (nous reviendrons sur ces chiffres). Soit environ 103 centimes de dollars donnés à Peta chaque minute. À raison de 1 440 minutes en une journée, cela correspond à un peu plus de 149 000 dollars par jour, pendant 24 jours. Peta aurait donc récolté environ 3,5 millions de dollars.
Cette campagne se démarque des précédentes, puisqu’on peut identifier l’organisme recevant les dons en question. Sur le rapport financier de Peta pour l’année 2018, on apprend que les dons sont déductibles d’impôts. PornHub contribuerait à hauteur de 6,5% des 54 millions de dollars perçus par Peta pour l’année 2018.
Ces exemples sont édifiants. Entre l’opacité des partenariats, les défiscalisations de bénéfices colossaux et une communication audacieuse et très travaillée, il n’y a aucun doute possible : nous nageons en plein greenwashing ! (...)
Malheureusement, l’entreprise ne va pas jusqu’à publier la consommation de ses data-centers. La consommation électrique nécessaire pour le visionnage de vidéos en streaming dépend de nombreux facteurs et il est impossible de savoir précisément quelle quantité d’énergie une année de PornHub représente.
Pour faire une très rapide estimation, nous pouvons nous baser sur le blog de Netflix, qui indiquait (en 2014) une consommation de 0,0013 kilowattheure par heure de streaming. Sur son blog, PornHub indique qu’en 2018, 10 498 heures de vidéo sont regardées chaque minute. Avec l’infrastructure de Netflix en 2014, cela aurait nécessité 13,65 kilowattheure par minute, soit environ 19 650 kilowattheure par jour. Pour comparer, en 2014 la Banque mondiale estimait la consommation moyenne d’électricité par habitant en France à 6 940 kilowattheure par an.
Ce calcul est trop approximatif à votre goût ? C’est parce qu’il n’existe que très peu de données fiables sur la consommation électrique réellement liée à la diffusion de pornographie sur internet. Les données divulguées par PornHub sont une exception. De plus, elles sont impossibles à vérifier.
Notons également que depuis 2014, il est fort probable que le poids des fichiers vidéo ait plus que triplé avec le passage au streaming en Ultra Haute-Définition.
De manière générale, les données stockées dans le cloud ont un impact environnemental énorme : béton, climatisations, effet rebond, métaux et terres rares, plastiques non-recyclables, énergies fossiles… et fonctionnement en permanence !
En bref : si internet était un pays, il serait le troisième plus gros consommateur d’électricité au monde et il est impossible de calculer précisément la part de cette consommation que représentent les plateformes de streaming pornographique. Sachant que PornHub est le quatrième site le plus populaire au monde et que 12% des sites internet sont à caractère pornographique, il est temps de disposer de chiffres précis.
L’exploitation des femmes et de la Nature sert le même système
Quel objectif poursuit PornHub en publiant des statistiques d’utilisation de ses services ? Pour « dédiaboliser » la pornographie à travers un double message : c’est une industrie comme une autre, où l’ambiance de travail est détendue et conviviale.
Loin de cette façade, la réalité est plus glauque :
Au niveau mondial, la pornographie est un moteur du trafic d’humains et d’esclaves sexuelles.
Plusieurs études sur le sujet illustrent à quel point la pornographie influence les fantasmes et les comportements. Entre autres, elle cultive une société où les adolescentes sont considérées comme d’excitants objets sexuels. (...)
C’est une industrie raciste qui décourage les actrices blanches à tourner des scènes avec des acteurs noirs. En outre, la popularité de la pornographie raciste est croissante. (...)
Même pour les actrices ayant eu des carrières légales et consentantes, les séquelles sont nombreuses. (...)
Le capitalisme et le patriarcat oppressent les femmes et exploitent la Nature. En conséquence, les femmes sont plus vulnérables que les hommes au dérèglement climatique.
L’écoféminisme est un mouvement qui met en avant les liens profonds entre deux formes d’exploitation intrinsèquement liées et dont l’industrie pornographique tire de grands bénéfices. (...)
L’industrie pornographique est particulièrement lucrative. Encore une fois, trouver des chiffres précis est loin d’être aisé. Lors de nos recherches, nous avons trouvé des estimations variant de 6 à 97 milliards de dollars de chiffre d’affaire annuel ! Pour comparer, en 2019 le budget annuel de l’éducation nationale est d’environ 50 milliards d’euros. (...)
Le tournage de films pornographiques engendre également une pollution résiduelle, liée à des pratiques sanitaires déplorables. Entre autres, l’omniprésence des drogues dures et des maladies a des effets énormes sur la santé des actrices et acteurs. Lorsque l’on prend en considération la pollution résiduelle liée aux médicaments, entre autres, on ne peut que s’inquiéter des conséquences de ces pratiques.
Enfin, on peut s’interroger sur l’ensemble des équipements d’audiovisuel qui comportent des matériaux rares et non-recyclables, des maquillages, des décors, des costumes, des accessoires, des préservatifs usagés, des campagnes de promotion et de tout l’ensemble de la chaîne logistique permettant de produire des films à faible budget, distribués partout dans le monde. (...)
Comme expliqué précédemment, le stockage de données est très gourmand en ressources naturelles. L’exécution d’algorithmes sur ces données est également une source de dépense énergétique importante. Plus il y a de données à traiter, plus les algorithmes sont gourmands en ressources.
Les chiffres dévoilés par PornHub indiquent une quantité de données très importante. L’entreprise vient également d’annoncer être en phase de test d’algorithmes parcourant les vidéos pour en décrypter le contenu.
Concrètement, l’objectif de cette Intelligence Artificielle dans la pornographie consiste à proposer des contenus pertinents aux utilisateurs, en fonction des paramètres de recherche et des historiques personnels. Ainsi, pour déterminer l’identité des actrices ou les positions sexuelles filmées sur chaque vidéo, des algorithmes vont consommer une quantité de ressources faramineuse ! (...)