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L’écologisme peut-il nuire à l’environnement ?
Article mis en ligne le 22 janvier 2019
dernière modification le 20 janvier 2019

La frénésie anxieuse engendrée par l’urgence environnementale laisse manifestement davantage prospérer et propager les illusions, la confusion, les propos partiaux et moralisateurs qu’elle ne donne à penser une écologie participative et factuelle, c’est à dire une écologie érigée collectivement et dont les fondements reposeraient essentiellement sur l’expérience et l’observation de faits.

Longtemps l’écologie a fait figure de science. Elle était une science qui faisait appelle aux sens, une science de terrain que chacun pouvait contribuer à enrichir à la condition sine qua non de daigner être mis à l’épreuve de son territoire. A travers cette écologie scientifique, femmes et hommes de tous siècles et de tous lieux ont cherché à percer quelques uns des mystères qui les entouraient. Ils se sont intéressés aux interactions intra et inter espèces et ont entrepris de comprendre les enjeux de l’organisation et de l’adaptation des êtres vivants. Ces recherches étaient motivées également par un certains nombres d’interrogations : Comment aménager les espaces ? Comment nourrir les populations et permettre leur déplacement ? Comment gérer les différentes ressources naturelles ? Comment permettre la production et l’approvisionnent des besoins élémentaires... La question écologique renvoyait donc à une question globale, complexe, indéniablement reliée à l’observation, à l’intuition et à l’analyse des territoires.

Le capitalisme, le basculement de nos sociétés dans l’ère thermo-industriel a rebattu les cartes des enjeux si bien que l’on a vu naître sur la vieille souche de l’écologie scientifique une ramification de nature idéologique nourrit par des ambitions politiques et/ou égotiques. (...)

A la différence de l’écologie scientifique, l’écologisme est une discipline bon marché. Pour l’incarner il suffit bien souvent de s’acheter une morale à bon compte et de suivre les méandres convenus d’un humanisme sirupeux. (...)

Une des caractéristique de l’écologisme est donc l’irrévérence à l’égard du passé. (...)

Assez pathétiquement donc, les victoires humbles du passé sont transformées en innovation du présent.

Aussi il existe de nombreuses déclinaisons de l’écologisme dont certaines ne manquent vraiment pas d’imaginations et d’ambitions. Les plus triomphantes en ces temps de vacillement sont certainement celles incarnées par les végans et les promoteurs de la croissance verte. (...)

On peut vouloir le retour des loups dans les montagnes, des steack in-vitro dans son assiette, et des centrales électriques bio-cosmiques pour faire marcher son grille pain. Le tout est d’être confortablement ailleurs. Sans volonté de ralentir et d’habiter simplement ce monde.

S’il y a un milieu ou l’écologisme est roi c’est bien dans le petit monde des célébrités. (...)

La dernière manifestation en date de cette mondanité en mal de « Nature » est probablement cette tribune parue dans le journal « Le monde » le jeudi 3 janvier dans laquelle 500 personnalités appellent à un lundi vert, soit à une journée hebdomadaire sans viande ni poisson dans les assiettes. Dans ce cas précis le problème qu’il semble important de soulever réside moins dans l’appel à une ritualisation d’une journée végétarienne -car à certains égards une telle invitation doit pouvoir se justifier- qu’à la confondante nature des arguments invoqués. Comment ne pas voir en cette tribune un mépris affiché à l’endroit de ceux qui perpétuent encore une pêche traditionnelle et côtière sur des embarcations telles que de petits ligneurs, fileyeurs ou encore caseyeurs. Comment ne pas entendre une injure de plus envers les éleveurs-paysans dont le travail participe pourtant à la préservation de la biodiversité et des écosystèmes menacés*. Par l’usage irresponsable de l’amalgame, de la caricature et de la désinformation les auteurs et signataires de cette tribune ne pouvaient pas mieux préparer le terrain pour ceux qui aspirent aveuglément à l’avènement d’une société végane. Ils ne pouvaient pas mieux s’y prendre pour illustrer cet écologie idéologique dont ils sont, malgré eux peut-être, les tristes représentants.

De cet écologisme là il n’en faut plus sans quoi nous risquons de nous précipiter plus violemment encore contre le mur. Car cet écologisme nous divise et manipule certains d’entre nous. (...)

Alors peut-être le moment est-il venu de préférer la complexité aux idées reçues, le doute aux certitudes, la territorialité à la virtualité, l’intuition véritable à la spéculation.