Bandeau
mcInform@ctions
Travail de fourmi, effet papillon...
Descriptif du site
l’Humanité
L’austérité : un virus tueur de systèmes sanitaires en Europe
Article mis en ligne le 22 mars 2020

La pandémie de coronavirus frappe désormais de plein fouet l’Europe. L’objectif affiché par plusieurs gouvernements : éviter un pic trop important et la saturation des hôpitaux, et pour cause. Les systèmes de santé européens, sinistrés par des années de coupes budgétaires et de choix libéraux, craquent. Zooms sur l’Italie, l’Espagne et le Royaume-Uni.

Italie soigner d’abord ceux qui ont le plus de chances de survie ?

À la faveur de la crise financière de 2007-2008, la part des dépenses de santé dans le PIB italien a chuté de 7,5 % à 6,5 %, dans un contexte de recul généralisé du PIB. Après plus de 12 ans d’austérité, le réveil est douloureux alors que surgit la pandémie. L’Italie est le deuxième pays le plus touché derrière la Chine, avec plus de 15 000 personnes contaminées au 12 mars. Elle découvre que son système de soins est exsangue, avec seulement 5 100 places en réanimation. Et un taux de remplissage en période ordinaire qui est déjà de 75 % ! Cela ne fait guère que 1 000 lits pour accueillir les patients malades du Covid-19. À cela s’ajoute une pénurie d’appareils respiratoires : il n’y en a que 3 000 dans la péninsule. Le gouvernement a pris des dispositions pour accélérer la production, avec un objectif de 500 unités mensuelles. Et la Chine a prévu d’acheminer en Italie 1 000 machines.

Le système de soins est aussi victime des politiques néolibérales. On enregistre des dysfonctionnements dans la relation entre secteurs public et privé. Les hôpitaux publics, qui assurent l’essentiel des soins dus à l’épidémie, sont en manque de personnel. Et les cliniques privées refusent que leurs employés prêtent, sur la base du volontariat, main-forte au secteur public. (...)

La situation est si catastrophique que l’Association des anesthésistes a adressé une note de « recommandation éthique » pour suggérer à ses membres, dans un contexte de manque de matériel et de lits, de privilégier les soins pour les personnes qui ont le plus de chances de survie, soit les personnes les plus jeunes. Un tri qui indigne.

Espagne dix ans de saignées et un sursaut

L’ancien ministre de l’Économie Luis de Guindos l’avait martelé sur tous les fronts : il faut « redéfinir l’offre basique des services publics ». En 2011, trois ans après la déflagration économique, le gouvernement espagnol du conservateur Mariano Rajoy taillait dans le vif au nom de la réduction du déficit public. La santé a alors été soumise à une terrible saignée.

Aujourd’hui, la pandémie met à nu les conséquences des sinistres « recortes » (coupes). (...)

Pedro Sanchez, a annoncé une injection de 14 milliards d’euros dans l’économie, dont 3,8 dans le secteur de la santé. Quant aux régions, elles bénéficieront d’une aide de 2,8 milliards pour renforcer leurs services sanitaires. L’état d’alerte et l’urgence sanitaire ouvrent la possibilité à l’administration publique de gérer les hôpitaux et cliniques privées, ainsi que leur personnel.

Royaume-Uni quatre fois moins de lits qu’en Allemagne

Le professeur John Ashton, ex-directeur régional de la santé publique pour le nord-ouest de l’Angleterre, n’a pas sa langue dans sa poche. La gestion de la crise du coronavirus par Boris Johnson est « pathétique ». Il y a une quinzaine de jours, le premier ministre conservateur britannique avait, avec légèreté – ou cynisme, au fond –, dans le droit-fil de Donald Trump, envisagé de laisser le virus se répandre dans toute la population, histoire, selon lui, de renforcer l’immunité générale… (...)