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L’action politique à l’ère du terminable. Entre temps sociaux et temps historiques
Article mis en ligne le 26 mai 2017
dernière modification le 22 mai 2017

« Deux temps historiques, inconciliables, s’affrontaient dans cette lutte sans trêve possible, qui opposait l’homme des totems à l’homme de la théologie. Car, tout d’un coup, l’archipel en litige était devenu un archipel théologique. Les îles changeaient d’identité, s’intégraient dans le mystère. (…). Faisant un bond de milliers d’années, cette mer Méditerranée devenait l’héritière de l’autre Méditerranée, et recevait avec le blé et le latin, le vin et la vulgate, l’imposition des signes chrétiens. (...)

Des trajectoires historiques, inconnues l’une à l’autre, se sont rencontrées sous le signe d’un Nouveau Monde il y a désormais six siècles. L’une des accélérations rythmiques trouvées par ce temps devenu commun est donnée par la Révolution française aux couleurs vivement dépeintes dans cet ouvrage d’Alejo Carpentier. L’inconciliabilité des temps historiques s’est fondue dans une nouvelle histoire mondiale, celle où la nouveauté peut surgir toujours et partout, imprévisibilité des passions politiques des peuples2. Un temps historique, venu de la dynamique du capitalisme, semble avoir unifié l’histoire de l’humanité, créé un seul univers mental, tendu les esprits et les actions vers l’accumulation comme seul mode d’existence. Il est une part de vérité dans cette affirmation. Mais la fusion des temps historiques, battant aux rythmes de l’accumulation économique et de la possibilité du changement politique, n’a pas abattu les murs entre temps sociaux. L’inconciliabilité de ces temps – en tant que représentations du temps – qui rythment tel ou tel groupe, telle force sociale dominante ou dominée, et cette pluralité des rapports aux actions menées n’ont pas disparu. Elles conservent une prégnance sensible dans l’espace comme dans le temps3. (...)

Le temps de l’économie, celui des cycles de Kondratiev, n’est plus subordonné à la très longue durée : il modifie directement les équilibres géo-climatiques du fait de la puissance considérable que l’être humain a acquise sur ces derniers6. Dès lors, le temps court des événements politiques, à l’importance passagère et potentiellement négligeable un jour, devient le seul à pouvoir provoquer une modification contemporaine des dynamiques travaillées par le temps long. Inversion de la chaîne causale entre temporalités historiques, entremêlement incertain pour les sciences sociales comme pour les sciences dures des réalités qu’elles recouvraient : la montée à la surface de cette longue durée relève d’un défi immense à l’analyse sociale – et, in fine, à l’action politique. (...)