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Khaled, Palestinien : "La frontière turco-grecque est très dangereuse. J’ai décidé de ne pas y risquer ma vie"
Article mis en ligne le 6 mars 2020

InfoMigrants a recueilli le témoignage de Khaled*, un immigré palestinien vivant à Istanbul. Samedi dernier, il a pris un bus pour la ville frontalière d’Ipsala afin de tenter de se rendre en Grèce. En vain.

Avec un groupe d’amis, nous sommes montés dans un bus depuis la place Topkapi à Istanbul et nous nous sommes dirigés vers la ville frontalière d’Ipsala samedi dernier. Nous n’avons rien dû payer pour monter dans le bus. Quand nous sommes arrivés à Ipsala, nous avons été débarqués dans une salle fermée et vide où environ 500 migrants se sont rassemblés. La salle n’était pas équipée pour recevoir des gens, nous n’avons donc trouvé que des chaises. Nous avons passé la première nuit dans cette salle froide et nous sommes sortis tôt le matin. (...)

Nous nous sommes dirigés vers le poste-frontière d’Ipsala en pensant pouvoir franchir la frontière par le passage officiel mais, à notre grande surprise, nous avons fait face à l’objection de la police turque. Ils nous ont dit de traverser la frontière depuis le milieu de la forêt et de ne pas s’approcher des points de passage officiels.

Nous avons été très étonnés par ce que nous avons vu. Toutes les rumeurs parlaient de portes ouvertes pour entrer en Grèce. Mais la vérité est tout autre. Nous avons trouvé les portes fermées, nous avons vu la police grecque faire des patrouilles aux frontières et avons également entendu qu’elle lançait des gaz lacrymogènes sur les migrants dans d’autres régions. On a eu peur d’aller à la confrontation.

De plus, nous étions avec des enfants et des femmes et il y avait des gens en chaises roulantes, ce qui nous empêchait de nous déplacer dans les forêts par temps froid et boueux.

"Nous avons dormi en plein air"

Après une journée entière de tentatives infructueuses pour franchir la frontière, nous avons décidé de dormir à l’air libre. Ce fut une nuit très difficile, nous avons dormi dans les bois et il faisait très froid. Nous avons tenté d’allumer des feux, en vain, car il pleuvait. C’était une situation tragique, en particulier pour les enfants et les personnes âgées. (...)

Au final, nous avons décidé de ne pas risquer nos vies. Un groupe de douze personnes et moi nous avons décidé de retourner à Istanbul en taxi. Les risques à la frontières étaient trop grands."

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"Je suis venu en 2019 en Turquie pour travailler. C’est un pays facile d’accès pour les Marocains car nous n’avons pas besoin de visa pour y entrer. J’ai travaillé à Istanbul dans le bâtiment et fait plusieurs petits boulots mais j’ai été déçu car mon salaire était similaire à ce que je gagnais au Maroc, environ 300 euros par mois. J’ai une femme et deux enfants à charge au Maroc, il ne me reste donc pas grand chose à la fin du mois. (...)

Quand j’ai entendu que Erdogan voulait ouvrir les portes vers l’Europe, je n’ai pas hésité une seconde. J’ai pris un bus pour environ 40 euros et je suis arrivé à la frontière dès le lendemain de sa déclaration. Mais j’ai vite vu que ce n’est pas ouvert du tout ! Les Turcs nous disent de passer mais les Grecs nous en empêchent par tous les moyens. (...)

Cela fait presque une semaine qu’on dort dehors. Un des Marocains de notre groupe a décidé de retourner à Istanbul. Mais je ne veux pas abandonner. Mon objectif est d’atteindre la France ou mieux, la Belgique. J’ai vécu plusieurs années à Liège quand j’étais plus jeune et mon rêve serait d’y retourner."