Pour l’anthropologue, la menace d’une dissolution du collectif, très actif contre les méga-bassines, a pour but de « criminaliser » une large partie du mouvement écologiste et d’empêcher de « mener des actions de protestation et de désobéissance civile ».
Les Soulèvements de la Terre n’est pas une organisation clandestine de l’ultragauche, fomentant je ne sais quels sombres desseins antidémocratiques, ainsi que la présente le ministre de l’Intérieur, mais un mouvement ouvert et très divers : s’y reconnaissent des collectifs territoriaux, des associations de défense de l’environnement, des paysans, des groupes de naturalistes amateurs, des syndicalistes, des mouvements d’éducation populaire, des chercheurs, bref des citoyens de tous âges et de toutes conditions qui sont révoltés par la dévastation de nos milieux de vie. (...)
Le mouvement Les Soulèvements de la Terre s’est constitué à l’initiative d’habitants de la ZAD de Notre-Dame-des-Landes, elle-même une expérience sociale d’une portée exceptionnelle, née dans la lutte contre un projet d’aménagement pharaonique, inutile et destructeur et qui se poursuit à présent par l’invention de nouvelles manières d’habiter en commun un territoire, en récusant la course frénétique au profit, les disparités insupportables de niveaux de vie et en mettant en acte un partage équilibré des lieux entre les habitants humains et non humains. (...)
Toutefois, du fait de la fragilité du statut des initiateurs du mouvement à Notre-Dame-des-Landes et de la précarité de leur situation juridique, il a paru nécessaire d’adosser le mouvement à une association animée par un conseil d’administration dont les membres présenteraient des garanties de représentation publique. C’est pourquoi j’ai accepté sans hésiter un instant de participer à l’Association pour la défense des terres lorsqu’on me l’a proposé.
C’était avant que le ministre de l’Intérieur ne propose de dissoudre Les Soulèvements de la Terre. En apprenant la nouvelle, trois mots me sont venus à l’esprit : inaction, accaparement, terreur.
Inaction. Etre Soulèvements de la Terre, c’est s’élever contre l’inaction climatique de l’Etat français, déjà condamné à deux reprises pour ce motif par les cours administratives ; c‘est lutter à la place d’une puissance publique défaillante (...)
Accaparement. Etre Soulèvements de la Terre, c’est s’opposer à l’accaparement des biens communs – les pâtures, les forêts, l’eau, la santé, le savoir – au seul profit d’une minorité, un processus de marchandisation et de privatisation du patrimoine collectif (...)
Terreur. Etre Soulèvements de la Terre, enfin, c’est s’élever contre la terreur, c’est-à-dire l’intimidation par les forces répressives de l’Etat de tous ceux qui ne pensent pas comme le gouvernement ; c’est aussi la vaine tentative de contenir une lame de fond en dissolvant une coalition de bonnes volontés, des centaines d’associations locales de toutes sortes, des dizaines de milliers de citoyens qui ont rejoint ce mouvement horizontal et décentralisé ; une dissolution dont le but pervers est de criminaliser ceux qui se reconnaissent dans ce mouvement et de les dissuader de mener des actions de protestation et de désobéissance civile. (...)
Je suis, nous sommes Les Soulèvements de la terre !