
L’assaut de la marine israélienne contre la flottille humanitaire pour Gaza et la mort de neuf passagers ont soulevé une large réprobation internationale. Loin d’être une simple bavure, cette attaque confirme le tournant radical pris par les autorités israéliennes vis-à-vis du droit humanitaire international et des organisations de défense de la personne.
(...) A quelques rares exceptions près, dans le monde jusqu’ici les attaques directes et programmées contre des humanitaires ou des militants des droits de la personne (y compris ceux qui n’ont pas respecté le principe de neutralité) ont surtout été l’œuvre de milices rebelles, de gangs criminels et d’Etats policiers. Parmi eux, les talibans, l’armée de la République serbe de Bosnie, les insurgés irakiens et les responsables des « guerres sales » en Amérique latine. Avec l’assaut meurtrier contre le navire turc, le gouvernement israélien a-t-il décidé de marcher sur les traces de ceux-ci ? (...)
En août 2009, au cours d’une réunion avec des colons, M. Moshe Yaalon, ancien chef d’état-major de l’armée et ministre chargé des questions stratégiques, qualifiait de « virus » les activistes du mouvement pourtant très modéré La Paix maintenant (...)
M. Netanyahou exigeait une refonte radicale du droit humanitaire international pour faire face à cette « menace ». « Paradoxalement, affirma-t-il, il est possible qu’une réponse ferme de dirigeants et de juristes internationaux éminents à ce rapport moralement tordu accélère le réexamen des lois de la guerre à l’ère du terrorisme. » (...)
Une chose est de critiquer les conventions de Genève et le droit humanitaire international, une autre est de les violer ou de les ignorer. Les acteurs étatiques et non étatiques le font sans cesse. Mais c’en est encore une troisième — fort différente — de voir dans ces lois mêmes et leurs défenseurs une menace pour l’existence d’un Etat, et de vouloir les combattre systématiquement. (...)
Si Israël s’entête à vouloir réécrire le droit humanitaire international et à réglementer la fourniture d’aide dans la région, et si des organisations internationales répondent par des défis légaux croissants et d’autres par l’envoi répété de bateaux, l’incident du Mavi-Marmara restera dans les mémoires comme le premier coup de feu de cette nouvelle bataille de l’humanitaire et du droit international.