Bandeau
mcInform@ctions
Travail de fourmi, effet papillon...
Descriptif du site
Le Monde Diplomatique
Israël à l’heure de l’Inquisition
mars 2016
Article mis en ligne le 11 juin 2016
dernière modification le 7 juin 2016

Un projet de loi approuvé par M. Benyamin Netanyahou entend imposer de nouvelles exigences de transparence aux associations israéliennes. Ce texte qui vise à pénaliser les organisations opposées à la politique du gouvernement s’inscrit dans le climat délétère d’une chasse aux sorcières orchestrée par les partis favorables à la colonisation.

Pas une semaine ne passe sans que la droite et l’extrême droite israéliennes prétendent débusquer de nouveaux traîtres. Organisations non gouvernementales (ONG) de gauche qualifiées de « taupes financées par l’étranger » collaborant avec l’« ennemi palestinien » ; écrivains, artistes, personnalités politiques : sur le Web, tous ont droit au shaming, c’est-à-dire aux intimidations et aux humiliations, souvent accompagnées d’insultes racistes et de menaces. En raison de leur opposition à l’occupation des territoires palestiniens, ou seulement parce qu’ils défendent la démocratie.

Même le président du pays, M. Reuven Rivlin, a été victime d’une telle campagne en décembre 2015. Il a eu le malheur de prendre la parole à la conférence organisée à New York par le quotidien de gauche Haaretz alors que des représentants de Breaking the Silence se trouvaient dans la salle. Cette association de militaires démobilisés qui témoignent sur leur service dans les territoires occupés est en effet accusée de porter atteinte à l’image d’Israël et de son armée. Elle a également été mise en cause pour avoir fourni des éléments de preuve à la commission d’enquête de l’Organisation des Nations unies (ONU) sur la guerre à Gaza durant l’été 2014. Le gouvernement israélien avait refusé de collaborer avec cette instance, dont le rapport a fait état de violations susceptibles d’être qualifiées de « crimes de guerre », perpétrées à la fois par Israël et par les groupes armés palestiniens (1).

Le 8 février dernier, par 50 voix pour et 43 contre (sur 120 députés), le Parlement israélien a adopté en première lecture un projet de loi sur la « transparence » des ONG. Porté par la ministre de la justice Ayelet Shaked, affiliée au Foyer juif, partisan de la colonisation, ce texte oblige toute association recevant des subventions d’un gouvernement étranger à mentionner l’identité de ses donateurs dans ses rapports publics et lors de ses contacts avec des organismes et des officiels israéliens. Faute de quoi elle devra s’acquitter d’une amende de 29 200 shekels (6 800 euros). S’il concerne nombre d’associations de gauche et de défense des droits humains qui bénéficient des financements de gouvernements européens ou nord-américains, ce projet de loi ne s’applique pas à celles qui reçoivent des financements étrangers privés, telles les organisations de droite qui contribuent au développement de la colonisation. Critiqué par l’Union européenne et par les Etats-Unis, ce vote est intervenu dans un contexte marqué par un climat de défiance à l’égard d’une partie de la société civile, et surtout par l’affirmation du projet politique du premier ministre Benyamin Netanyahou. (...)