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Israël-Palestine : pourquoi il n’y aura pas de troisième intifada
Article mis en ligne le 23 septembre 2011

Les Nations unies examinent en ce moment une demande de reconnaissance de l’Etat palestinien. Le gouvernement israélien est vent debout contre l’initiative. Les diplomates occidentaux s’affairent pour éviter la crise.

A des milliers de kilomètres de là, qu’en pense la population palestinienne ? De retour de deux semaines en Cisjordanie, je reviens avec des impressions déroutantes.

(...) L’événement passionne certes le petit cercle des fonctionnaires de l’Autorité palestinienne, qui travaillent à le préparer depuis des mois. C’est le cas par exemple de Ziyad, jeune diplomate de l’Autorité palestinienne, et lui-même fils d’un cacique de l’OLP. Quand je lui demande s’il croit vraiment que cette offensive diplomatique peut galvaniser la population palestinienne, il doit admettre que non.

De fait, l’immense majorité des Palestiniens de Cisjordanie a bien autre chose en tête. Depuis la fin de la seconde intifada et l’arrivée au pouvoir du gouvernement de Salam Fayyad en 2007, la Cisjordanie est calme. Elle a retrouvé le chemin de la croissance économique, qui reste très précaire – contraintes de l’occupation, dépendance vis-à-vis de l’aide internationale et des importations, chômage à 25%. (...)

Pour une grande partie des Palestiniens, la vie quotidienne est trop difficile pour placer grand espoir dans un événement aussi lointain que la session annuelle de l’Assemblée générale des Nations unies. C’est le cas notamment dans les camps de réfugiés : épicentre historique de la révolte palestinienne et de la répression israélienne, ils restent aujourd’hui des zones de relégation et de pauvreté. Le chômage y atteint 30% à 40%, l’ONU a la charge d’y gérer les urgences sociales.

A Jérusalem-est, le camp de Shuafat concentre tous les maux qui pèsent au quotidien sur les réfugiés : enserré entre deux quartiers de colonisation, verrouillé par deux check points israéliens, il est séparé de Jérusalem et encerclé sur trois côtés par le mur de séparation.

La responsable du centre communautaire des femmes me décrit les violences quotidiennes du camp, dans la rue, dans les cours d’école, dans les familles – violences particulièrement aiguës dans ce camp qu’Israël délaisse tout en interdisant son accès à l’Autorité palestinienne.
(...)

Cet éloignement du grand jeu diplomatique en cours, on le retrouve paradoxalement à l’autre bout du spectre social palestinien, chez les élites de Ramallah. Il suffit d’observer les innombrables panneaux publicitaires qui ornent les rues de Ramallah pour comprendre que la classe moyenne palestinienne vit aujourd’hui à l’ère du consumérisme. (...)

Fayyad a contribué plus qu’aucun autre à bâtir cet Etat palestinien que l’ONU est sur le point de reconnaître ; mais la société palestinienne issue de cette ère nouvelle sera de plus en plus individualiste, de moins en moins politisée.
(...)

Cette lassitude générale des Palestiniens est à mes yeux la principale raison de penser qu’il n’y aura pas de troisième intifada. Tous les observateurs de terrain semblent s’accorder là-dessus, et le calme qui règne depuis des mois en Cisjordanie est révélateur.

(...) Wikio