
Pourquoi des hommes agressent-ils sexuellement des femmes, des enfants ou d’autres hommes ? Pourquoi des hommes payent-ils pour des relations sexuelles ? Pourquoi consomment-ils de la pornographie ? Pourquoi battent-ils leur compagne ? Pourquoi tuent-ils leur conjointe et leurs enfants, ou exclusivement leurs enfants ? Pourquoi prennent-ils les armes pour massacrer leurs collègues d’étude, de travail ou des gens à l’église, à la mosquée, à la synagogue, ou encore tirent-ils de façon aléatoire sur des cibles qui leur sont inconnues ? Pourquoi sont-ils des meurtriers en série à caractère sexuel ?
Les histoires de crimes dits conjugaux, qui sont en fait des crimes très majoritairement masculins, ponctuent l’actualité de façon récurrente. Les comptes rendus dans les médias sur les cas de harcèlement sexuel comme ceux faisant état d’agressions sexuelles en font tout autant.
On s’émeut lorsqu’il est question de crimes haineux, mais les viols et les meurtres de femmes ne sont pas vus comme des crimes de haine, et la pornographie échappe à la caractérisation de propagande haineuse à l’égard des femmes. Non, la pornographie relèverait tout simplement de la liberté d’expression (en fait, au mieux, elle serait du ressort de la liberté de commerce). Pourtant, la propagande haineuse est criminalisée par de nombreux États, ce qui s’avère une entorse à la liberté d’expression. Et la prostitution de millions de femmes n’émeut guère les gens qui défendent la pornographie en tant que liberté. Pour beaucoup, la prostitution serait une activité comme une autre, un simple travail, relèverait d’un choix individuel rationnel, et rien ne devrait interdire le droit des hommes à user des femmes soumises à leur service sexuel. Toute une industrie mondiale a été développée au profit des prostitueurs, ce qui a engendré le développement de la traite des femmes et des enfants à des fins de prostitution et le tourisme dit sexuel. La prostitution est devenue banale dans de nombreux pays. Elle est légale dans les bordels, les vitrines ou les zones de tolérance de certains pays comme l’Allemagne, les Pays-Bas, la Suisse et ailleurs, largement tolérée par d’autres pays qui engrangent des devises étrangères sur le sexe des femmes, comme la Thaïlande, la Corée du Sud et ailleurs.
Certes, tous les hommes ne deviennent pas des prostitueurs. Or, lorsque la prostitution est une industrie comme une autre, alors le nombre d’hommes qui payent pour l’accès sexuel au corps d’une femme ou d’un enfant augmente de façon importante. Si, au Canada, environ 11% des hommes ont eu des relations sexuelles tarifées et, en France, environ 12,5%, aux Pays-Bas, c’est désormais 60% des hommes, en Allemagne, c’est 66%, et au Cambodge, haut lieu de tourisme pédocriminel, c’est 65%. Déjà en 1995, 75% des Thaïlandais avaient payé pour du sexe. En Suède, en 1998, soit avant l’adoption d’une loi pénalisant les prostitueurs et criminalisant les proxénètes, environ 13% des hommes étaient des prostitueurs occasionnels ou réguliers, en 2013, ils n’étaient plus que 8,5%.
Pénaliser les prostitueurs n’affecte qu’une minorité d’hommes (sauf dans les pays qui ont depuis des dizaines d’années normalisé l’industrie de la prostitution), tandis que légaliser et légitimer cette industrie affecte la société dans sa totalité. Dans ces sociétés, il apparaît normal que les femmes soient au service sexuel des hommes, que leur destin en soit un de soumission aux besoins et au plaisir du « premier » sexe.
Beaucoup d’hommes dissocient le sexe de l’affectivité. C’est évidemment le cas des prostitueurs. C’est ce que de nombreux hommes apprennent dans la pornographie. C’est ce que certains pratiquent violemment en agressant sexuellement leur partenaire ou une inconnue. Cette dissociation est l’un des traits de la masculinité dans une société patriarcale. (...)