
Manuel Valls a dit vouloir remettre en cause le regroupement familial. Pourtant, il concerne peu de monde et la procédure est de plus en plus longue et compliquée.
« La question du regroupement familial pourra être posée. » Le ministre de l’Intérieur Manuel Valls a à nouveau lancé le débat sur les droits accordés aux familles étrangères en matière d’immigration, laissant penser que la législation est trop permissive. Pourtant, il est de plus en plus difficile pour un conjoint de Français de venir vivre en France. Pour un étranger installé dans l’Hexagone, faire venir sa famille relève également du parcours du combattant.
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De 1984 à 2006, la vie était assez simple pour les couples mixtes : le conjoint étranger d’un ressortissant français bénéficiait d’un accès inconditionnel et immédiat à la carte de résident, valable dix ans. Mais Nicolas Sarkozy, alors ministre de l’Intérieur, a changé la donne. Désormais, un étranger marié à un Français ne peut bénéficier d’une carte de résident qu’après avoir vécu trois ans avec une carte de séjour « vie privée et familiale », à renouveler annuellement, et à condition de prouver qu’il a fait des efforts pour s’intégrer (apprentissage de la langue, respect des valeurs de la République).
La carte de résident, la croix et la bannière
Pour obtenir cette carte de séjour, il faut franchir un parcours semé d’embûches. (...)
dévoiler une part de votre intimité ne suffit pas. Depuis 2007 et la loi Hortefeux, un visa de long séjour n’est délivré qu’à l’issue d’un test d’évaluation de la connaissance du français et des valeurs de la République, souvent effectué dans le pays d’origine. Si le niveau d’Igor est insuffisant, il doit suivre une formation gratuite mais obligatoire. Sinon, c’est niet pour le visa. (...)
le président du Gisti explique avoir « déjà eu un dossier où un regroupement familial a été refusé parce que les toilettes n’étaient pas aérées, un autre parce qu’il manquait 30 euros au seuil des revenus ou parce que deux enfants de sexe et d’âge différents allaient devoir dormir dans la même chambre. Et quand l’on dépose un recours, ça prend encore deux ou trois ans ! » (...)
Les lois successives signées notamment Sarkozy et Hortefeux (en 2003, 2006 et 2007) ont détricoté la loi de 1984 qui, en accordant automatiquement une carte de résident de dix ans dans le cadre du regroupement familial, favorisait l’intégration par la stabilité du séjour. Elles en ont même inversé la philosophie : désormais, l’intégration est testée en amont, et même en priorité pour ceux qui, ayant des attaches familiales en France, ont le droit de s’y établir. Et il faut maintenant prouver qu’on est intégré pour obtenir un droit au séjour stable.