
Sans grande surprise, la Commission européenne déclenche donc une enquête approfondie sur le projet d’acquisition de Lagardère par Vivendi. Deux groupes français, engagés dans le multimédia, l’édition de presse et de livres plus spécifiquement : or, Vivendi possède aussi Editis, depuis 2018, numéro deux de l’édition française. La présence de Hachette Livre, premier éditeur en France, au sein de Lagardère, dont Vivendi détient 57 %, pose bel et bien problème.
« La concurrence du marché dans l’édition de livres, favorise la diversité des idées. Cela conduit à l’épanouissement de chaque maillon dans la chaîne de valeur, depuis la création d’œuvres jusqu’à leur distribution », souligne la commissaire à la Concurrence, la Danoise Margrethe Vestager dans un communiqué de la CE, officialisant la suite de la procédure.
« Le rachat de Lagardère par Vivendi réunit deux grands éditeurs de livres dans la francophonie, ainsi que de magazines populaires. Dans ces conditions, cette transaction doit être soigneusement examinée : elle est susceptible de réduire le choix [des œuvres publiées] et conduire à une hausse du prix de vente », poursuit-elle.
Mais la Commissaire pointe également des risques concernant l’accessibilité aux œuvres, ainsi que la perspective que soient commercialisés des livres « de moindre qualité pour les lecteurs de livres de langue française, ainsi que de magazines ».
Enfin, la Commission identifie des problématiques liées à la commercialisation de magazines.
Des éditeurs démunis face au géant
« En s’appropriant Lagardère, Vivendi deviendrait le premier acteur du secteur de l’édition de livres francophones, ainsi que le principal groupe intégré sur ce marché », note la Commission. « D’autres concurrents, comme Madrigall [Gallimard, Flammarion, Casterman, NdR] ou Média Participations [Dargaud, Dupuis, Lombard, Seuil, etc, NdR] ont une présence plus conscrite sur le marché. La Commission craint que la transaction ne diminue la diversité, l’accessibilité et le coût des livres de langue française. »
Les deux groupes cités furent d’ailleurs parmi les plus fervents opposants au rachat de Lagardère, avant de se voir refuser toute possibilité de grappiller quelques éléments d’Editis en cas de démantèlement. (...)
La Commission dispose de 90 jours pour mener son enquête approfondie, et devra donc prendre une décision d’ici au 19 avril 2023 — attendu que l’ouverture de l’enquête ne préjuge pas de son issue. La phase 2 est donc officialisée : reste à voir comment les repreneurs intéressés réagiront…