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Lundi matin
Grèves pour le climat en Belgique : « l’écologie sera une lutte ou ne sera pas » - Entretien avec Génération Climat
Article mis en ligne le 7 mai 2019
dernière modification le 6 mai 2019

En Belgique, le mouvement des « grèves pour le climat » initié par Greta Thunberg a été notoirement plus suivi qu’en France. A son pic, ce sont plusieurs dizaines de milliers de jeunes qui séchaient les cours de jeudi en jeudi. A côté du très institutionnel « Youth For Climate », qui assure l’organisation et la médiatisation des marches, un petit groupe de jeunes s’est constitué sous le nom de « Génération Climat ». Dans son manifeste intitulé : « l’écologie sera une lutte ou ne sera pas », ils écrivent : « Nous allons déranger, bloquer, créer et nous battre et débattre, car nous voulons nous faire entendre afin d’empêcher le système capitaliste et industriel de détruire la seule planète qui abrite la vie et la beauté. Et nous avons compris que négocier avec des ennemis ne nous mènerait à rien de concluant. ». Nous leur avons fait parvenir ces quelques questions.

nous sommes radicaux, ce qui signifie que nous voulons résoudre les problèmes à la racine.

Notre discours s’articule autour de 4 valeurs principales : l’anticapitalisme, la décroissance, la justice sociale, et la démocratie directe. Nous avons donc fait le choix d’entrer dans le débat politique, au sens noble du terme et non partisan, et de nous positionner clairement, contrairement à Youth For Climate. Nous pensons qu’il y a un manque de discussions, de débats, de démocratie dans le mouvement des grèves. Les leaders de YFC semblent déconnectés de la “base” et ne soucient guère des envies d’actions plus radicales d’une part croissante des manifestants. Génération Climat a donc pour objectifs de démocratiser le mouvement, en créant des lieux de discussions démocratiques, de diffuser un message d’écologie radicale, ainsi que de diversifier les modes d’actions. Nous nous sentons assez proche de groupes comme Act For Climate Justice, qui prône la désobéissance civile et l’action directe, mais considérons également les Gilets Jaunes comme des alliés (cf. notre valeur ‘justice sociale’, indissociable de la justice climatique). (...)

Génération Climat est un groupe entièrement composé de francophones. Actuellement, nous sommes une dizaine à faire partie du noyau dur, et venons tous soit de Bruxelles, soit du Brabant Wallon. Nous défendons une perspective d’écologie radicale. Comme nous l’avons dit plus haut, on remet en cause le système depuis la racine. Les discours sur le capitalisme vert, la croissance verte, ou le développement durable sont des écrans de fumée, des illusions dont il faut vite se débarrasser, car ils ne remettent pas en cause le coeur du problème mais tentent de nous faire croire qu’on peut “tout changer sans ne rien changer”. (...)

De plus, le système politique est complètement subordonné au système économique : les traités de libre-échange, les impératifs de productivité des entreprises ou de croissance sont incompatibles avec la survie du monde vivant. Un Etat qui déciderait de faire décroître sa production de richesse, ce qui est nécessaire si l’on veut vraiment réduire notre impact écologique, se ferait complètement bouffer par les autres et serait disqualifié du grand jeu de la concurrence. C’est un leurre de faire reposer nos espoirs sur les représentants politiques, des partis ou des candidats. Il faut recréer de véritables démocraties, à taille humaine, locales. Lewis Mumford, historien et spécialiste de la technique, disait : “La démocratie est une invention de petite société”. Changeons d’échelle pour changer le système.
(...)

Les apparitions dans les médias sont risquées. Dans le monde d’aujourd’hui, s’asseoir sur un plateau télé pour un débat de 30 minutes, auquel sont invités 6 intervenants, c’est avoir la certitude que seuls des discours simplistes, démagogiques ou incohérents pourront en sortir. Nous en avons fait l’expérience, et le sentiment que nous avons ressenti presque à chaque fois, c’est la frustration. Car le temps de parole est compté, les questions des journalistes calculées afin de neutraliser toute complexité, et au final cela débouche quasi systématiquement sur des dialogues de sourds, dont personne n’aura rien appris, ou si peu.

Chaque fois que nous sommes invités par des médias ou des institutions pour nous exprimer, nous essayons donc de nous concerter et de peser le pour et le contre. Car nous n’avons aucun intérêt à venir parler pour ne rien dire, ou à apparaître au grand jour au seul motif que cela nous ferait connaître du grand public. Les médias sont un moyen pour nous exprimer, pas une fin. Il nous arrive donc de refuser certaines invitations, car on sent que c’est une forme de piège, de jeu dans lequel on a pas envie de jouer. (...)

On a pas encore organisé nos propres actions directes. Mais on prépare une grosse journée de lancement du collectif le 19 mai. On y projettera un film d’écologie radicale, on y discutera stratégies, il y aura une initiation à la désobéissance civile… Cela fait partie d’une dynamique qui a eu du mal à se lancer, mais qui est en train de se concrétiser. (...)