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Glyphosate : le « secret des affaires » au secours de Monsanto
Article mis en ligne le 26 février 2016
dernière modification le 21 février 2016

L’Agence européenne de sécurité des aliments a récemment conclu à l’innocuité du glyphosate, la substance active du Roundup de Monsanto, en contradiction avec l’opinion émise auparavant par l’OMS. Elle justifie cet avis en invoquant trois études scientifiques non publiées, réalisées par des industriels. Études que l’Agence refuse de rendre publiques au nom du « secret des affaires ». Une illustration des abus auxquels peut donner lieu cette notion, alors que le Parlement européen doit se prononcer dans quelques semaines sur un projet de directive controversé.

Les critiques, à commencer par l’ONG bruxelloise Corporate Europe Observatory et la journaliste Stéphane Horel, avaient immédiatement dénoncé l’influence des industriels sur cette décision de l’Agence européenne. Selon eux, une majorité des experts mis à contribution par l’AESA est en situation de conflits d’intérêts, car liés à des groupes agrochimiques. L’agence allemande qui a élaboré l’avis sur le glyphosate recourt même à des experts salariés par l’industrie : son panel chargé d’évaluer les pesticides intègre ainsi des employés de Bayer et BASF (lire notre article). En l’occurrence, 84% des experts consultés par l’Agence sur le glyphosate ont tout bonnement refusé que leur nom soit révélé au public.
Études fantômes

Pour motiver son opinion controversée, l’Agence européenne de sécurité des aliments déclare s’être appuyée en particulier sur trois études réalisées par des firmes agrochimiques [2], dont les experts de l’OMS n’avaient pas pris connaissance – et pour cause : elles n’ont jamais été publiées. Les noms de leurs auteurs n’ont pas non plus été révélés, ce que Monsanto a justifié en expliquant que ses « employés » risquaient de se retrouver « harcelés » (alors que ces études sont censées émaner d’autres firmes).

Cherchant à en savoir plus, le Corporate Europe Observatory a demandé à l’Agence de révéler la teneur de ces études, en invoquant les réglementations européennes sur l’accès à l’information. Mais l’Agence a refusé, argumentant que ces études incluaient des « secrets commerciaux » et que leur publication porterait donc atteinte à la compétitivité des firmes qui les ont produites vis-à-vis de leurs concurrentes. Argument qui paraît d’autant plus étrange à l’ONG que le brevet sur le glyphosate a expiré depuis 15 ans et que toutes les firmes qui le commercialisent coordonnent étroitement leur lobbying au sein de la « Glyphosate Task Force », sous l’égide de Monsanto. Le Corporate Europe Observatory a donc fait appel de ce refus, qui lui paraît une illustration éclatante des abus liés à l’invocation du « secret des affaires ».
La directive sur le secret des affaires soumise au vote en avril (...)

Les ONG revendiquent depuis des années la publication systématique des données scientifiques qui sous-tendent les avis rendus par l’AESA. Une procédure est d’ailleurs en cours au niveau de la Cour européenne de justice, suite à une plainte déposée en 2011 par Greenpeace, qui cherchait à obliger la Commission européenne à dévoiler les données scientifiques justifiant l’avis précédent de l’AESA sur le glyphosate. Les ONG ont gagné en première instance, mais la Commission - soutenue par toute l’industrie chimique - a fait appel.

L’autorisation du glyphosate a un caractère éminemment stratégique pour Monsanto car la substance est étroitement liée au développement et à la promotion de ses OGM. (...)