
La percée majeure dans le domaine de la fusion nucléaire, annoncée plus tôt ce mois-ci, a décuplé les espoirs des scientifiques et des politiques quant à la construction de la première centrale à fusion nucléaire d’ici 2030. Mais d’autres chercheurs, plus pessimistes ou réalistes, mettent en garde sur le « Saint Graal » énergétique que représente cette source d’énergie. Selon eux, il serait déjà trop tard pour nous sortir des crises énergétique et climatique dans lesquelles nous sommes empêtrés.
(...) Tous les experts soulignent l’importance de la découverte, mais rappellent l’existence de nombreux défis techniques et scientifiques à venir pour rendre la fusion viable. Selon eux, la fusion commerciale ne sera effective probablement que dans plusieurs décennies, ce qui soulève des questions sur la rapidité avec laquelle la technologie peut jouer un rôle dans la décarbonisation de l’électricité.
Récemment, plusieurs revues ont publié les lettres de chercheurs mettant en garde contre le « Saint Graal » de la fusion nucléaire, soupçonnant même une reprise de cette technologie dans l’industrie de l’armement nucléaire.
Une prouesse technologique trop tardive pour « sauver la planète »
L’écologiste et spécialiste des énergies renouvelables Mark Diesendorf de l’Université de Nouvelle-Galles du Sud en Australie, explique dans une lettre publiée par The Guardian : « Passer du seuil de rentabilité, où la production d’énergie est supérieure à l’apport énergétique total, à un réacteur à fusion nucléaire commercial, pourrait prendre au moins 25 ans ». Il ajoute : « D’ici là, le monde entier pourrait être alimenté par des énergies renouvelables sûres et propres, principalement solaires et éoliennes ». (...)
Effectivement, les échelles de temps impliquées dans le développement de la fusion en tant que source d’énergie sont trop importantes pour répondre aux préoccupations climatiques les plus urgentes, qui impliquent la réduction immédiate des émissions de carbone. (...)
Aneeqa Khan, chercheur en fusion nucléaire à l’Université de Manchester, déclare à Forbes : « La fusion arrivera trop tard pour faire face à la crise climatique. Nous sommes déjà confrontés à la dévastation du changement climatique à l’échelle mondiale, en regardant seulement les inondations au Pakistan, les sécheresses en Chine et en Europe cet été ».
Une avancée qui dissimule notre inaction
Les experts soulignent que les réductions de carbone ne peuvent pas attendre des années ou des décennies pour commencer. Le monde fait face à une accélération du changement climatique, de la perte de biodiversité, de la dégradation des habitats naturels, auxquelles s’ajoutent des crises économiques, sociales et politiques. Le monde tant espéré à l’issue de la pandémie de COVID-19 est tout son contraire. (...)
les futurs réacteurs à fusion pourraient fournir aux puissances militaires de nouvelles façons de générer les matières premières pour les bombes nucléaires. (...)