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Fukushima : le témoignage du gouverneur japonais de la région
Article mis en ligne le 10 mars 2012
dernière modification le 7 mars 2012

Tout de suite après mon élection, plusieurs incidents aux deux centrales de Fukushima m’ont été rapportés. Cela m’a fait prendre conscience d’un réel problème avec le nucléaire.

Le premier incident remonte à 1989, 4 mois après mon élection. Un morceau de métal de 30 kg est tombé dans le coeur du réacteur n°3 de Fukushima Daiini (N°2) [La centrale de Fukuskhima compte deux groupes de réacteurs, Daiini, n°2, et Daiichi, n°1]. Ces deux centrales s’étendent sur 3 communes. Tomioka-machi, une de ces communes, a reçu le rapport de l’incident seulement 6 jours après qu’il se soit produit. La centrale de Fukushima a d’abord pris contact avec Tepco à Tokyo, c’est seulement ensuite que Tepco a appelé la préfecture de Fukushima, puis la prefecture a enfin prévenu la ville de Tomioka. Je me rappelle que le maire de Tomioko avait alors indiqué avoir été très frustré par cette situation.

La deuxième affaire qui a ébranlé ma confiance envers la politique nucléaire fut la décision du conseil municipal Futaba-machi, où se trouvent les réacteurs 5 et 6, de construire 2 nouveaux réacteurs, tout ça dans le but de recevoir de nouvelles subventions. Je pensais jusqu’alors qu’une ville possédant 2 réacteurs n’aurait jamais de difficulté financière.

J’ai compris par la suite que les villes qui ont accepté une centrale sur leur territoire n’arrivent pas à maintenir une économie stable sur deux générations.

La troisième affaire remonte à 1993. Tepco nous a demandé d’ajouter une piscine pour stocker les combustibles usagés des centrales de Fukushima. Je leur ai demandé quand ils comptaient récupérer ces combustibles. La réponse était claire : en 2010. Mais quelques mois plus tard, le gouvernement national présentait un projet de long terme dans lequel était précisé que la récupération des combustible était à discuter en 2010. Promesse cassée donc.

En 1995 il y a eu un accident sur le surgénérateur Monju à Fukui. Une fuite de sodium a provoqué un incendie. Mais ceci a été dissimulé par la société électrique en charge de ce surgénérateur. D’autres accidents ont été dissimulé et un employé s’est suicidé dans cet établissement (Monju).

Cet ensemble d’incidents ont contribué à me rendre très sceptique

(...) Alors que j’organisais les consultations au sujet de la politique énergétique, l’affaire de la dénonciation interne de Tepco a éclaté. Pas moins de 29 documents sont arrivés par fax au bureau de la Préfecture. Un employé (du constructeur des installations nucléaires) a dénoncé TEPCO, suite à la découverte, lors des contrôles réglementaires, de divers problèmes dans plusieurs réacteurs (comme une fissure dans les installations), car l’entreprise avait falsifié les données et dissimulé les incidents pour pouvoir continuer à faire fonctionner les réacteurs. La NISA a reproché à TEPCO d’avoir caché ces problèmes.

Or, chose curieuse, la dénonciation était parvenue déjà depuis 2 ans au Ministère. Ce qui signifie que l’Etat n’a pas voulu divulguer ces informations pour couvrir Tepco. (...)

Au Japon, depuis l’ère Meiji, existe une règle pour les fonctionnaires : ceux-ci sont uniquement responsables envers l’empereur, c’est-à-dire, ils ne sont pas responsables vis-à-vis du peuple. Cette attitude est irresponsable mais elle arrange bien les fonctionnaires et elle perdure jusqu’à aujourd’hui.

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