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Finlande : le peuple des Samis se bat contre une ligne ferroviaire vers l’Arctique
Article mis en ligne le 9 juillet 2019
dernière modification le 8 juillet 2019

Les Samis sont inquiets. Une ligne ferroviaire pour relier la Finlande à l’océan via la Norvège est dans les cartons... De quoi entraver la libre circulation des rennes, dont l’élevage est crucial pour cette population indigène, et faciliter la création de nouvelles exploitations minières.

À Inari, ville de 6.000 habitants dont le tiers est sami, le vent du nord est glaçant au début du mois de mai. Dans cette municipalité du nord de la Laponie qui accueille un musée de la culture sami et le Parlement sami de Finlande, difficile de distinguer cette communauté autochtone des autres Finlandais. Ses membres vivent dans la modernité du XXIe siècle et leurs costumes colorés traditionnels ne sont pas visibles dans la vie quotidienne. La plupart d’entre eux parlent aussi bien sami que finnois, et fréquemment anglais.

Toutefois, un combat les anime chaque jour : faire perdurer leur culture face à un monde globalisé. Depuis quelques années, au Parlement sami de Finlande, le « couloir de l’Arctique » (« Arctic corridor », en anglais) — un projet d’un chemin de fer — est l’un des sujets les plus brûlants. La présidente du Parlement sami, Tiina Sanila-Aikio, une trentenaire coiffée d’un bonnet en tissu traditionnel, craint pour l’avenir de son peuple si une ligne de chemin de fer était construite au beau milieu de ses terres ancestrales.
La fonte des glaces permet la création d’une nouvelle route commerciale plus rapide entre l’Asie et l’Europe (...)

Cela ouvre aussi de nouvelles perspectives d’exploitation des ressources naturelles : entre 20 et 30 % des réserves de gaz non exploitées dans le monde et entre 5 et 13 % des réserves de pétrole se trouveraient ainsi dans la région arctique. Devant ces nouvelles opportunités, la Finlande a lancé il y a quelques années l’idée d’une ligne de chemin de fer vers l’Arctique, qui lui permettrait de se connecter à l’océan via la Norvège. (...)

La ligne ferroviaire a notamment pour objectif de faciliter le transport minier et d’hydrocarbures (...)

Une ligne de chemin de fer au milieu des forêts laponnes compliquerait la libre circulation des rennes. « En termes de végétation, la quantité de biomasse est faible quand on est dans le Grand Nord, donc la façon dont les rennes sont élevés par les Samis nécessite de très grands espaces, dit Sini Harkki, directrice de Greenpeace Finlande qui s’oppose au projet depuis ses débuts. « Et, les rennes sont déjà menacés par le changement climatique, le tourisme, les coupes d’arbres… » (...)

Il y a quelques mois, le ministère des transports finlandais avait déclaré ce projet « non viable économiquement », créant un espoir pour le peuple sami. Fin avril pourtant, le Conseil régional de Laponie a intégré le couloir de l’Arctique dans son plan d’occupation des sols. Début mai, un nouvel investisseur privé — qui n’est autre que l’entreprise en charge de la construction d’un tunnel dans la Baltique entre Tallin et Helsinki— a fait son apparition. Peter Vesterbacka, co-fondateur de l’entreprise FinEstBayArea Development, a annoncé que celle-ci financerait de nouvelles études afin de mettre sur les rails le projet, qui pourrait se concrétiser en 2030. (...)

Cette annonce a provoqué une nouvelle fois la colère des Samis. « Nous n’avons pas été consultés, rappelle Tiina Sanila Aikio. C’est par les médias que nous avons eu connaissance des premières études menées par les autorités ». De son côté, Timo Lohi assure que le projet n’en est qu’à ses prémices et qu’il est encore trop tôt pour entrer dans la phase de consultation avec les Samis (...)

À l’automne dernier, Greenpeace Finlande a formé des Samis à des actions de désobéissance civile et de protestation et fait pression sur le nouveau gouvernement finlandais pour qu’il respecte les droits du dernier peuple indigène d’Europe.