
Promesse du candidat Hollande, répétée après son élection, la fermeture de la plus vieille centrale nucléaire de France n’est pas encore acquise, malgré un accord passé entre l’État et EDF en août dernier. Le conseil d’administration d’EDF doit décider aujourd’hui si l’entreprise accepte la fermeture. (...)
À 14h, un conseil d’administration ordinaire se tient au siège d’EDF, à Paris. Six représentants des salariés et six administrateurs indépendants doivent se prononcer sur une éventuelle fermeture.
Le projet de fermeture de la centrale nucléaire de Fessenheim a été présenté ce mercredi 14 septembre 2016 aux représentants du personnel d’EDF, l’exploitant du site, à l’occasion d’un comité central d’entreprise (CCE). Ce plan, réclamé depuis des années par les antinucléaires, a pu voir le jour après que l’État et EDF sont tombés d’accord le 24 août 2016 sur le montant de l’indemnisation qui sera versée à l’électricien en contrepartie de la fermeture anticipée des deux réacteurs de la centrale du Haut-Rhin.
L’accord prévoit « une première étape de 100 millions d’euros et des étapes ultérieures en fonction de plusieurs paramètres, dont le prix de l’énergie » dans les années suivant la fermeture, a indiqué à l’AFP un porte-parole du ministère de l’Environnement. Selon l’agence Bloomberg, qui cite des sources proches du dossier, EDF pourrait en définitive recevoir au moins 400 millions d’euros.
Ce plan pourrait aboutir à la fermeture du site de Fessenheim, d’ici à 2018. L’occasion de faire le point, en cinq questions, sur cette centrale devenue le symbole de la descente aux enfers du nucléaire français.
1. Fessenheim est-elle pire que les autres centrales ?
Oui, parce qu’elle cumule plusieurs facteurs d’inquiétude. (...)
2. Les incidents qui s’y passent sont-ils inquiétants ?
Oui. André Hatz, de Stop Fessenheim, a épluché les rapports de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et recensé toutes les pannes et autres problèmes significatifs. (...)
3. Pourquoi le réacteur numéro 2 est-il fermé depuis plusieurs mois ?
Le réacteur numéro 2 de la centrale a été arrêté le 16 juin par l’Autorité de sûreté nucléaire. À la suite de la découverte de défauts dans la cuve de l’EPR de Flamanville, Areva a ouvert les archives de son usine du Creusot. L’ASN y a découvert des « dossiers barrés », qui diffèrent de ceux remis officiellement. Neuf des dossiers concernent les réacteurs de Fessenheim, auxquels Areva fournit des pièces. (...)
Conséquence, le certificat d’épreuve — soit l’autorisation — du générateur de vapeur a été retiré. EDF doit démontrer la fiabilité de l’équipement avant d’obtenir le redémarrage du réacteur. Le problème est suffisamment sérieux pour que l’électricien estime la reprise au plus tôt au 31 mars 2017. (...)
4. Qu’ont tenté les militants antinucléaires pour fermer la centrale ?
Dès l’annonce du projet de centrale au début des années 1970, les antinucléaires se sont mobilisés. « Les habitants venaient par milliers aux manifestations. Les militants occupaient le terrain où devait être construite la centrale... se souvient André Hatz, de Stop Fessenheim. Finalement, nous avons empêché la construction d’un troisième et quatrième réacteur. »
Une fois la centrale mise en service, la mobilisation est retombée. Ces dernières années, avec le vieillissement de la centrale et la multiplication du nombre d’incidents, la lutte a repris. (...)
5. La centrale de Fessenheim va-t-elle fermer ?
En 2012, dans son engagement numéro 41, le candidat François Hollande avait inscrit : « Je fermerai la centrale de Fessenheim. » Quatre mois plus tard, lors du discours d’ouverture de la première conférence environnementale, il a déclaré : « La centrale de Fessenheim, qui est la plus ancienne de notre parc, sera fermée à la fin de l’année 2016. »
Depuis, il y a eu la loi sur la transition énergétique pour la croissance verte, publiée au Journal officiel le 18 août 2015. Ce texte a permis au gouvernement de justifier le report de la fermeture de la centrale. Il indique qu’une nouvelle autorisation d’exploitation d’une centrale ne peut pas être délivrée si elle a pour effet de porter la production d’électricité d’origine nucléaire au-delà de 63,2 GW — la production actuelle. Traduction : l’EPR de Flamanville, en construction, ne pourra pas ouvrir tant que Fessenheim sera encore en activité. « Par un tour de passe-passe, ce plafond de 63,2 GW est devenu plancher dans les discours officiels, analyse André Hatz, de Stop Fessenheim. (...)
Le processus de fermeture présenté ce mercredi à EDF pourrait aboutir en 2018. D’ici à fin octobre, le comité central d’entreprise rendra un avis, consultatif. Puis, le conseil d’administration statuera sur le projet de fermeture avant la fin de l’année. Mais ce n’est pas encore gagné. « Les politiques parlent maintenant de retrait d’autorisation d’exploitation, et non plus de fermeture à proprement parler, informe Charlotte Mijeon, de Sortir du nucléaire. Nous craignons qu’un nouveau gouvernement puisse alors très facilement revenir sur la décision. Et, d’ici à 2018, il y a l’élection présidentielle, je le rappelle. »