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[Attac33] Le Ptitgrain n°335
Est-ce que ce monde est sérieux ?
Jean - Luc Gasnier
Article mis en ligne le 20 juillet 2015

Après le remaniement ministériel à Athènes, le nouveau plan d’ajustement structurel imposé à la Grèce - présenté avec beaucoup d’ironie et de cynisme comme un nouveau plan d’aide financière - est désormais prêt à entrer en application avec son calendrier de réformes . Tout un chapelet de nouvelles privations et de restrictions attend les populations les plus fragiles au nom de l’orthodoxie budgétaire.

Les grecs ont devant eux un véritable parcours du combattant, une épreuve semée d’embûches, surveillée par les gardiens de l’ordre économique allemand, comptables intransigeants, malveillants, épiant le moindre faux pas. C’est l’épilogue, certainement provisoire, d’une longue série d’intimidations - prenant la forme de pourparlers mais sans aucune volonté réelle d’écoute et de dialogue de la part des créanciers de la Grèce - qui avait débuté dès l’arrivée au pouvoir du gouvernement issu des rangs de Syriza.

Dans l’ultime « négociation » avec ses homologues européens, Alexis Tsipras ne disposait que du surcroît de légitimité démocratique qui venait de lui être fourni par les résultats du référendum , un argument bien dérisoire face à des libéraux dogmatiques qui entendent construire une Europe au service de l’Euro et non pas des peuples, le Conseil européen ressemblant de plus en plus à un conseil d’administration dont le PDG serait Angela Merkel . Depuis le vote de 2005 sur la Constitution européenne, nous connaissons le sort réservé au suffrage populaire par les libéraux et socio-libéraux. Le pari de Tsipras ne pouvait qu’échouer ; il a été ressenti comme une provocation supplémentaire, une hérésie, qu’il convenait de châtier pour l’exemple et pour éviter toute contagion. Le premier ministre grec a accepté de combattre dans cette arène financière, seul, et sans arme adéquate. Il en connaissait probablement le prix à payer mais avait-il réellement le choix ? Il a fini par capituler devant la chancelière allemande et ses assistants. Et il fallait probablement être fou pour tenter de résister au pouvoir de l’argent. Le gouvernement grec connaît désormais avec son chef le sort des déments qui ont perdu le sens commun et ne se plient pas spontanément à l’autorité : il est mis sous tutelle. Parfois, l’Europe est un asile . . .

François Hollande, homme de peu de conviction, a salué le courage de Tsipras. Il me fait penser à ces aficionados, spectateurs de témérité, qui ressortent satisfaits et enjoués de la corrida lorsque le bestiau a bien combattu et que le matador a pu saluer la noble assemblée en brandissant les deux oreilles et la queue.

Comme le taureau andalou de la chanson de Cabrel nous pouvons nous poser la question : « Est-ce que ce monde est sérieux ? »

Le monde dans lequel veut prendre place l’UE n’est pas un monde de paix et de coopération entre les peuples mais un monde de compétition organisée par les puissants, porteur d’affrontements, et nourrissant tous les extrémismes. La radicalité économique épuise la démocratie, le social et l’environnement. La construction européenne s’y défait tous les jours un peu plus tandis que le spectacle politique que nous offrent nos dirigeants est affligeant et avilissant.

Pendant combien de temps la Grèce pourra-t-elle tenir ?

Pendant combien de temps les citoyens continueront-ils à être sages ?