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Le Monde
« En France, l’interdiction d’une manifestation ne peut pas être imposée a priori comme un ordre du ministre aux préfets »
#democratie #droit #manifestations #Darmanin
Article mis en ligne le 14 mai 2023

Le chercheur Olivier Cahn, spécialiste du droit pénal, estime, dans un entretien au « Monde », que les atteintes à la liberté de manifester se multiplient dangereusement ces derniers mois.

Deux rassemblements, organisés dimanche 14 mai à Paris par des groupuscules d’ultradroite en hommage à Jeanne d’Arc, seront interdits, conformément aux instructions récentes du ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, a annoncé le gouvernement mercredi 10 mai. Par ailleurs, l’Assemblée nationale a voté la création d’une commission d’enquête sur les « groupuscules, auteurs de violences à l’occasion de manifestations », à la demande de la majorité présidentielle. Pour Olivier Cahn, professeur de droit pénal à l’université de Cergy Paris et chercheur au Centre de recherches sociologiques sur le droit et les institutions pénales, le ministère de l’intérieur se trouve dans une dangereuse dérive par rapport au droit.

Que pensez-vous de l’annonce de Gérald Darmanin consistant à refuser toutes les autorisations de manifestation à l’ultradroite et à l’extrême droite ?

Cette annonce est, pour dire le moins, étonnante, puisque le principe de la liberté de manifestation est consacré en droit français par une décision du Conseil constitutionnel de 1995. Elle pose deux types de problèmes. D’abord, comment définir ce qui relève de l’extrême droite ou de l’ultradroite ? Ces notions sont politiques, elles correspondent à des catégories élaborées par les services de renseignement, mais elles ne font pas sens juridiquement. (...)

Dans sa décision de 2012 « Faber contre Hongrie », la Cour européenne des droits de l’homme [CEDH] dit bien que l’autorité publique doit garantir le droit de manifester, y compris lorsque la manifestation défend des idées dérangeantes ou choquantes. (...)

Le ministre demande aux préfets de violer la loi. En matière de manifestation, le principe est la liberté de manifester. Il n’y a pas de régime d’autorisation administrative mais seulement une obligation de déclaration, qui doit être faite entre trois jours francs et quinze jours avant l’événement prévu. Mais cette déclaration n’est pas un préalable à une autorisation, j’insiste là-dessus. (...)