
Que s’est-il passé le samedi 30 juillet 1955 dans le quartier de la Goutte d’or ? L’histoire peu connue de cette « émeute » a été reconstituée la première fois par Farid Taalba, écrivain et militant.
De ce périmètre délimité par le Bld de la Chapelle, les rues de Chartre et de la Goutte d’or dans le 18ème arrondissement de Paris, R. Gautier parle de « cette médina qui s’est lentement reconstituée autour de la rue de la Charbonnière » [1]. Pour l’Humanité, il s’agit du « quartier ouvrier de la Goutte d’or (…) où s’entassent dans une inimaginable promiscuité des ouvriers algériens surexploités » [2]. Paris-Match quant à lui révèle « la « cour des miracles » de la Charbonnière » où « les Nords-Africains n’avaient fait que succéder aux GI’s déserteurs de 1944 et aux mauvais garçons montés des ports du Sud » [3]. L’Aurore, pour finir, décline « les ouvriers musulmans venus chez nous pour y gagner leur vie » [4] sans cesser d’agiter le spectre de la « la criminalité Nord-africaine » dont il faut débarrasser les Parisiens.
Aussi faut-il rappeler que la guerre d’Algérie dure depuis 9 mois et que le quartier reste sous l’œil vigilant de la police. (...)
le 29 juillet, la veille du 30, l’Assemblée nationale prolonge l’état d’urgence en Algérie. Enfin, le 30, le hasard du calendrier veut que ce jour soit le jour de l’Aïd el Kébir. Et malgré ce contexte inquiétant chargé de symboles, les travailleurs émigrés viennent en masse à la Goutte d’or pour célébrer cette fête importante qui rappelle le sacrifice d’Abraham.
Entre 13h 30 et 14h, tout commence dans la rue de la Charbonnière. Selon l’Humanité, « un car de police fit irruption sur le marché aux puces qui se tient au coin et les agents arrêtèrent un jeune Algérien qui venait d’acheter une chemise. « Une chemise a été volée ! » Le car repartit, fit un tour, revint et, soudain, virant, vint défoncer la vitrine d’un café, broyant au passage la table d’un marchand de 4 saisons. Le marchand fut grièvement blessé. Il perdait son sang en abondance. Les policiers s’opposèrent à son transfert à l’hôpital et, devant l’indignation de la foule des Algériens qui s’étaient massés, ils se hâtèrent de demander du renfort » [6]. (...)