
La Commission européenne n’est pas prête à changer de cap en matière de droit d’auteur. Avec la publication de deux nouvelles « feuilles de route »1 sur le droit d’auteur, les brevets et le droit des marques, l’institution qui a négocié l’ACTA décide d’en rester au statu quo. Ironiquement, elle invoque la crise pour justifier la poursuite de ces politiques qui ont d’ores-et-déjà échoué.
La Commission européenne refuse de voir que le partage de la culture et de la connaissance favorise la collaboration, encourage l’innovation et garantit notre souveraineté sur les ressources informationnelles. Au contraire, elle appelle dans ses nouvelles « feuilles de route » sur la directive IPRED à poursuivre les politiques qui ont poussé des milliers de citoyens européens à descendre dans les rues contre l’ACTA l’an dernier, et qui menacent nos droits fondamentaux sur Internet tout en freinant l’innovation.
Après l’épisode ACTA, la Commission ne peut ignorer la crise de légitimité croissante du dogme du droit d’auteur. Ainsi, elle joue en finesse et se garde de faire référence à la privatisation de la répression ou à des mesures intrusives en matière de vie privée, qu’elle encourage pourtant depuis plusieurs années pour protéger le modèle dépassé de l’industrie du divertissement. Mais en aucun cas elle ne rompt avec les logiques répressives. (...)
« C’est en effet une période de troubles que nous traversons. Elle nécessite des politiques destinées à promouvoir la circulation de la culture et du savoir, plutôt que les intérêts des détenteurs de rentes que sont les ayants droit. Or, la Commission refuse de reconnaître l’échec de ses politiques fondées sur les restrictions et le contrôle de la connaissance. Ces politiques ont conduit au recul des droits politiques et sociaux des citoyens, sur Internet et au-delà, et rendent nos économies plus rigides, moins propices à l’innovation. Il nous faut lutter contre l’influence néfaste des innombrables lobbies des médias, des télécoms et d’autres secteurs industriels puissants qui s’accrochent à un statu quo dépassé, pour mettre en œuvre un nouveau modèle fondé sur la décentralisation et le partage. » déclare Philippe Aigrain, cofondateur de l’organisation citoyenne La Quadrature du Net.