
Alors que de tragiques attentats ont frappé le cœur de l’Union européenne, la directive relative à la lutte contre le terrorisme, actuellement en discussion au Parlement européen, pourrait accélérer la mise en place de politiques sécuritaires dans toute l’Europe. La Quadrature du Net s’inquiète d’une européanisation des dérives françaises en matière d’antiterrorisme.
De nombreux pays européens, dont la France, se sont engagés dans une fuite en avant répressive, cherchant à transposer à l’échelle européenne leurs mesures nationales de surveillance récemment adoptées. Le projet de directive présenté par la Commission européenne le 2 décembre 2015 reste relativement vague et s’intéresse principalement à quatre points :
- l’harmonisation de la réponse pénale et de la définition des infractions constitutives d’actes de terrorisme, de financement et de préparation de terrorisme ;
- les mesures permettant d’empêcher la circulation à l’étranger à des fins de commission d’actes terroristes ;
- la lutte contre les discours d’apologie et d’appel à la commission d’actes de terrorisme, spécialement via Internet ;
- le soutien à apporter aux victimes de terrorisme.
D’emblée, ce projet de directive recule sur la place des droits fondamentaux (...)
De plus, le rapport publié le 9 mars - et non encore adopté - propose d’ajouter de nombreuses mesures potentiellement attentatoires aux droits fondamentaux à la liberté d’expression et d’information, notamment par la mise en place de mesures de blocage de sites internets.
Chacun des grands axes de cette directive (harmonisation pénale, mesures liées à la circulation, soutien aux victimes, mesures liées à Internet) a potentiellement des répercussions sur les droits fondamentaux, mais le principal axe sur lequel La Quadrature du Net apportera son analyse et son action lors du processus législatif est le troisième point relatif aux mesures liées à Internet et aux droits à la liberté d’expression et d’information.
Une fois de plus, Internet est visé et présenté uniquement comme vecteur de recrutement et de radicalisation de terroristes. Il apparaît à nouveau comme le bouc émissaire des multiples échecs que traduisent ces meurtres de masse, et fait l’objet d’inacceptables propositions de censure (...)
La proposition de directive, émanant de la Commission européenne, ne prévoit aucun véritable garde-fou permettant d’en limiter l’impact sur les droits fondamentaux, pourtant garantis dans l’article 6 du Traité sur l’Union européenne. (...)
Le terrorisme qui s’attaque à nos lieux de vie, à la liberté de la presse et à nos institutions démocratiques cherche clairement à déstabiliser un système fondé sur l’État de droit et la liberté. La lutte contre le terrorisme ne doit pas accentuer cette déstabilisation, en bafouant nos textes fondateurs et traités qui protègent ces droits et libertés. La France, qui s’enfonce mois après mois dans une dérive sécuritaire inquiétante, ne peut imposer ses mesures de surveillance et de censure à ses partenaires européens. La Quadrature du Net appelle les Parlementaires européens à travailler à une consolidation des fondements et valeurs de l’Union européenne, au lieu de participer à leur délitement.