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Defenseur des Droits
Des risques d’atteintes aux droits et libertés qui fragilisent la démocratie
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Article mis en ligne le 15 avril 2023

Dans une démocratie représentative, le suffrage universel permet à tous les citoyens d’élire des représentants chargés d’exprimer la volonté générale.

Au-delà du système représentatif, la démocratie repose également sur des droits et libertés, tels que les libertés d’expression, de réunion, de manifestation et d’association, qui permettent notamment à ceux qui sont éloignés de la vie politique ou qui n’ont pas le droit de vote d’influencer la prise de décision collective.

Toute atteinte portée contre les droits et libertés, qui constituent l’un des piliers de la démocratie, peut conduire à fragiliser l’édifice.

Un mouvement de remise en cause de la liberté d’association

Protégée par la Constitution et la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, la liberté d’association est un des principes fondamentaux d’une société démocratique. A l’instar de la liberté de communication, de réunion et de manifestation, elle permet l’expression dans l’espace public de la pluralité des opinions et des intérêts collectifs au sein de la société.

Les associations permettent à la société de rendre visible des problèmes ignorés par les institutions. En particulier, de nombreuses d’entre elles se sont structurées pour défendre et rendre audibles celles et ceux dont la voix est généralement trop faible pour être entendue.

Depuis plusieurs années, le Défenseur des droits dénonce un affaiblissement de cette liberté qui se manifeste de différentes manières, plus ou moins insidieuses.

Depuis 2016, l’institution déplore l’existence de pratiques d’intimidation des forces de l’ordre à l’encontre des associations de défense des plus précaires présentes sur le terrain lors des opérations d’expulsion des campements d’exilés[1]. Le projet de loi pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration comporte d’ailleurs, dans sa version issue du Sénat, un article 17 dont l’adoption aurait autorisé la fouille des véhicules des particuliers lorsqu’il existe « une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner que celui-ci transporte une personne ayant commis ou tenté de commettre une infraction relative à l’entrée et au séjour des étrangers en France ». Les critères particulièrement vagues pour mettre en œuvre une telle fouille auraient permis aux forces de l’ordre de fouiller systématiquement les personnes soupçonnées d’être des membres d’associations d’aides aux exilés.

A l’occasion de l’adoption de la loi confortant le respect des principes de la République, le Défenseur des droits a également dénoncé la restriction de la liberté d’association que constitue le conditionnement de l’attribution de subventions à la signature d’un « contrat d’engagement républicain » (...)

Enfin, il faut rappeler que cette même loi a facilité la dissolution d’associations en permettant de leur attribuer la responsabilité d’agissements commis par un de leurs membres agissant en cette qualité, si elles en ont connaissance et se sont abstenues de les faire cesser. Ce dispositif fait peser une obligation de contrôle des membres de ses membres particulièrement lourdes pour une association petite et peu structurée[3].
Une stigmatisation inquiétante de la Ligue des droits de l’Homme

La Cour européenne des droits de l’homme estime que la stigmatisation d’associations par les autorités publiques, combinée à la menace de mesures de contrôles et de sanctions, peut porter atteinte à la liberté d’association[4]. Ces phénomènes réduisent la marge de manœuvre des associations en les intimidant, les exposent à des difficultés financières et humaines et peuvent provoquer leur dissolution.

La Ligue des droits de l’Homme, constituée en défense du capitaine Dreyfus, et qui depuis sa reconstitution après sa dissolution par le régime de Vichy a agi en faveur des droits des femmes, des peuples colonisés, des exilés ou des personnes les plus précaires, a fait l’objet d’une telle stigmatisation par des responsables politiques. (...)

une suspension des subventions accordées par l’État et par les collectivités territoriales à la Ligue des droits de l’Homme a été évoquée. Ce faisant, une telle mention valide implicitement l’idée selon laquelle la Ligue des droits de l’Homme pourrait remettre en cause gravement l’État au point de pouvoir justifier la suppression de subventions, notamment par des collectivités locales.

En outre, les subventions publiques accordées à la Ligue représentent 29% de son budget : un retrait de ces subventions pourrait conduire à une réduction substantielle de son activité.

Par conséquent, le Défenseur des droits constate, à travers les réclamations qu’il reçoit, une intensification des risques d’atteintes à la liberté d’association. Une telle évolution est hautement problématique dans un État démocratique.