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Des niveaux record de dépenses militaires... et de suicides. Les armes se retournent contre le peuple grec.
Article mis en ligne le 26 septembre 2015

une des plus grandes causes de l’augmentation de la dette du pays, les dépenses militaires, via le témoignage de l’ex-secrétaire d’État à la défense Costas Isychos ; et une des faces les plus dramatiques des conséquences de cette crise de la dette et de sa calamiteuse gestion, l’augmentation des suicides, via le réseau de défense des victimes de suicide. Deux témoignages terre à terre pour rappeler à celles et ceux qui voudraient nous faire croire que la question de l’endettement public est complexe et loin des réalités des gens, qu’il n’en est rien et que nous ne sommes pas dupes !

(...) Ainsi, en 2014, la Grèce était encore la championne d’Europe des dépenses militaires |1|. Ces montants exorbitants illustrent bien, selon lui, qu’il ne s’agit pas seulement de contrôler la validité des procédures d’achats mais bien d’une question de démocratie : « les intérêts de défense nationale requièrent-ils un tel niveau de dépense ? » (...)

une importante partie du matériel acquis au cours des dernières décennies était destinée à remplir des objectifs fixés dans le cadre de l’OTAN. Frégates, radars Avax, F16, autant d’acquisitions qu’il conviendrait donc de réinterroger pour l’ex-secrétaire d’État à la défense, à fortiori en ces temps de crise. (...)

l’ancien vice-ministre interroge la pertinence des contrats passés avec les États-Unis dans le cadre du FMS |2|. En effet ce soi-disant programme « d’assistance » consiste pour le pentagone à vendre leurs équipements en fin de vie. Un gâchis pour monsieur Isychios qui constate l’achat de matériels obsolètes qui ont besoin de pièces de rechanges et de personnel hautement qualifié pour leurs remises en état. Plus globalement, il dénonce la politique de la Grèce en matière d’achat d’armes qui facilite la corruption et consiste selon lui à : « acheter d’abord et réfléchir après ! ». (...)

Par ailleurs, Costas Isychos dénonce une impunité totale pour une série d’entreprises de l’armement. En effet, alors que des entreprises telles que Rheinmetall Defence ou Siemens ont été condamnées dans des affaires de corruption, elles ne sont toujours pas exclues des marchés publics européens et peuvent donc poursuivre leur business comme si de rien n’était.

C’est donc le tableau d’une Grèce sur-équipée en matériel militaire onéreux, obsolète, défectueux et dont l’utilité est discutable, que nous a dressé l’ex-vice ministre à la défense. Pour conclure, il a fait part à l’assemblée de son inquiétude pour les temps à venir. En effet, les coupes de fonctionnement prévues dans le troisième mémorandum représentent selon lui une menace importante dans un système où les jeunes conscrits n’ont que 2 repas par jour, où leurs familles doivent pourvoir elle-mêmes à leur équipement et où seulement 50 % des unités de soins intensifs des hôpitaux militaires fonctionnent faute de personnel.

Suite à cet interpellant exposé, les bénévoles du réseau de défense des victimes de suicide ont apporté à cette journée une dimension aussi émouvante que combative. Le ton a été donné par la fille de Dimitris Christoulas, retraité qui a mis fin à ses jours sur la place Syntagma le 4 avril 2012 en laissant une lettre qui expliquait son geste par son désespoir face à la crise en cours : « Il l’a fait à Athènes, sur la place du parlement pour nous inviter à refuser de nous suicider tous les jours. Et c’est ce que refuse cette Commission. Il est certain qu’elle fera encore l’objet de campagnes de dénigrement car les conclusions qu’elle tire sont désastreuses pour ce gouvernement ainsi que pour les gouvernements européens » a-t-elle déclaré devant l’assemblée.

Car le cas de monsieur Christoulas est loin d’être isolé, et très nombreux sont les Grecs qui se sont suicidés ces dernières années en laissant derrière eux un message clair sur les raisons de leur acte, à l’image de ces propos sans équivoque rapportés hier par un des membres du réseau : « j’espère être le dernier à payer vos décisions par le sang ». Les membres de la Commission et du réseau se sont d’ailleurs accordés pour que l’ensemble de ces témoignages soit intégré au rapport final de la Commission. (...)

À l’issue de cette poignante après-midi, qui a montré une fois de plus la violente réalité qu’a subie, et que continue de subir, le peuple grec, la présidente de la Vouli a conclu par ces mots : « Il arrive parfois au cours de notre vie qu’on nous demande de devenir complice d’une politique criminelle. Mais il est essentiel de se rappeler en pareil moment que toute position de pouvoir a un seul objectif : celui de servir le peuple ».