
Acteur essentiel de la préparation de la loi sur la transition énergétique, Denis Baupin, député écologiste, fustige le retard que prend la France avec le nucléaire. Evoquant la possibilité d’un accident grave dans le pays, il expose l’état des forces et des arguments à l’orée d’une joute politique décisive.
Député EELV de Paris, Denis Baupin est particulièrement engagé sur les questions énergétiques et nucléaires. Il est rapporteur d’une Commission d’enquête parlementaire sur le coût de la filière nucléaire : un travail important, qui prépare la loi sur la transition énergétique que le Parlement doit adopter en 2014. A la veille de l’anniversaire de la catastrophe de Fukushima, Reporterre s’est entretenu avec lui.
Un accident nucléaire aussi grave que Fukushima est possible en France (...)
Nous parlons d’abord de la catastrophe nucléaire de Fukushima. Pour Denis Baupin qui s’est rendu sur place, "une catastrophe nucléaire ne se finit jamais", parce que les effets s’en font sentir sur des générations et des générations.
Une conséquence de la catatrophe est qu’en France, les autorités comme l’ASN (Autorité de sûreté nucléaire) ou l’IRSN (Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire) ont un tout autre discours sur la possibilité d’un accident nucléaire.
Alors, "- Un accident aussi grave que Fukushima est-il possible en France ?
– Oui, répond Baupin, puisque le président de l’ASN le dit. Et que l’IRSN a fait une étude sur les coûts possibles d’un accident, qui se chiffreait en centaines de milliards d’euros".
Que signifierait un accident en France ? "- Une partie du territoire qui devient invivable. Un territoire qu’on doit évacuer parce que la radioactivité y est trop forte"
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Les objectifs de la loi sur la transition énergétique ? "Réduire les émissions de gaz à effet de serre par quatre, diviser la consommation d’énergie par deux, et réduire la part du nucléaire d’ici 2025. Le premier pilier, c’est l’économie d’énergie, et le deuxième, les énergies renouvelables, qui sont des énergies de flux, inépuisables, par rapport aux vieilles énergies de stock, le nucléaire et les fossiles : c’est la grande révolution du XXIe siècle."
Et de ce point de vue, la France est en retard, selon le député : "C’est un peu comme à l’époque où tout le monde passait à Internet et nous, on restait au minitel. On nous parle sans arrêt de la compétitivité française : la compétitivité, c’est pas de rester isolé sur son vieux truc pendant que les autres sont en train de se moderniser.
Le nucléaire, c’est le minitel ». (...)
"On va avancer sur l’efficacité énergétique, parce que tout le monde est d’accord. Pour la décentralisation, on va aussi progresser. On va avancer sur les renouvelables, parce que c’est incontournable. Pour le nucléaire, l’engagement de 50 % en 2025 sera pris dans la loi, mais pour les outils, on ne sait pas encore quel sera le contenu final. On pèse là-dessus au maximum avec notre force de conviction et d’argumentation – par cette commission d’enquête -, mais aussi avec notre force de formation politique. Parce qu’on n’envisage pas une seconde de faire partie d’une majorité qui ne mettrait pas en œuvre les engagements qu’elle a pris sur la transition énergétique." (...)