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réseau "sortir du nucléaire"
De l’art de siéger à l’Assemblée nationale et d’enfouir les déchets
Article mis en ligne le 30 juillet 2012
dernière modification le 27 juillet 2012

Les épanchements radioactifs du Tricastin ont une nouvelle fois laissé l’impression que l’industrie nucléaire ne rendait de comptes qu’à elle-même, et qu’il fallait attendre un incident sérieux pour que l’Etat se rappelle à l’obligation de contrôler une activité aussi prompte au rayonnement

Un examen plus détaillé des influences et intérêts croisés, entre producteurs d’énergie nucléaire et tutelle politique, ne fait que confirmer cette désagréable impression.

(...) Prenons le cas de l’Andra, l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs. Cet établissement public est chargé de l’inventaire et du stockage des déchets nucléaires en France. A ce titre, il lui incombait notamment de répertorier et de signaler l’existence des 700 tonnes et plus de déchets radioactifs d’origine militaire, entreposés au Tricastin, sans autre protection qu’une butte de terre, et sans autre débouché que la nappe phréatique où puise la population environnante. (...)

Depuis mai 2005, l’Andra est présidée par François-Michel Gonnot, qui est aussi député UMP de l’Oise. Ce cumul est théoriquement interdit. La loi du 13 juillet 1988, en son article 145 (ou “L.O 145”), interdit en effet à un député ou à un sénateur d’être membre ou président du conseil d’administration d’un établissement public, sauf si les textes organisant cet établissement l’autorisent expressément(1). Les statuts de l’Andra permettent bien la nomination, au conseil d’administration, d’un député ou d’un sénateur, ès qualité, sur proposition de l’Assemblée Nationale. Mais cet unique siège est pourvu de longue date. Il était occupé, entre juillet 2002 et avril 2008, par Christian Bataille, député PS, et fervent promoteur de la cause nucléaire, auquel a succédé Geneviève Fioraso, autre députée PS, autre nucléariste convaincue.

Pour faire néanmoins de François-Michel Gonnot le président de l’Andra en mai 2005, le gouvernement - alors dirigé pour quelques jours encore par Jean-Pierre Raffarin, proche de M. Gonnot a modifié par décret les statuts de l’Andra en y inscrivant la possibilité de nommer un élu local au conseil d’administration. C’est donc à ce titre, “élu local”, que Mr Gonnot a été parachuté à la direction de l’établissement public. Curieusement, en octobre 2007, un nouveau décret a abrogé toutes les règles fixant la composition du conseil d’administration de l’Andra. Le cumul de mandats y redevient donc illégal, à la lettre, comme il l’était dans l’esprit. (...)

A la tête de l’Andra se trouvent ainsi deux députés, en position d’élaborer, de proposer ou de voter des lois dans lesquelles ils ont un intérêt direct : précisément le mélange de genres que le législateur a voulu prévenir avec la “L.O 145”.
Ainsi la récente loi sur les déchets radioactifs, adoptée en mai 2006, a été largement inspirée et impulsée par Christian Bataille, tandis que François-Michel Gonnot se déployait activement dans les débats publics ayant précédé le vote du texte. Cette loi a considérablement renforcé l’Andra, en augmentant ses ressources financières, en validant l’option privilégiée par l’agence du stockage souterrain pour les déchets hautement et moyennement radioactifs, et en prévoyant un accroissement de ces capacités de stockage à partir de 2015.

Aussi François-Michel Gonnot pouvait-il se targuer en mai 2006, devant le Conseil National des Ingénieurs et Scientifiques Français (CNISF), de l’épais coffrage politique entourant l’industrie nucléaire (...)

Nous avons, en résumé, la situation suivante : un député, fondateur et animateur d’un club où se côtoient dirigeants d’entreprises et parlementaires, par le truchement d’une société de conseil et de lobbying dont il a été l’associé ; un député qui contribue à la promulgation d’une loi, organisant le stockage à grande échelle des déchets radioactifs, dont les bénéficiaires sont indirectement lui-même, en tant que président de l’établissement chargé de mettre en œuvre cette loi, ainsi que les entreprises productrices de déchets nucléaires, et partenaires de son club énergétique. (...)

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