
En Egypte, en Tunisie, en Algérie ou même en Syrie, des médias indépendants ont éclos depuis les Printemps arabes. Tous partagent des aspirations communes : informer face aux intox et à la propagande, consolider leur indépendance malgré des moyens réduits, faire de l’investigation et traiter des sujets de fond, y compris ceux qui fâchent les conservatismes culturels. Confrontés à des régimes répressifs, à la menace terroriste ou à la guerre-civile, ils se battent pour les sociétés démocratiques du futur. Basta ! a croisé plusieurs de ces journalistes courageux, à l’occasion d’une rencontre organisée à par le site OrientXXI.
Son site d’information est une « fille de la crise ». Lina Attalah est directrice de Mada Masr, un média indépendant égyptien lancé à la veille du coup d’État militaire de 2013 contre le président islamo-conservateur Mohamed Morsi, démocratiquement élu un an plus tôt. Basés au Caire, les membres de Mada Masr ont tous en commun d’avoir été renvoyés du journal Egypt Independent. En cause : leur trop grande indépendance d’esprit et leur liberté de parole. « Nous avons dû fonder notre propre média pour continuer notre travail, couvrir l’actualité en profondeur, y compris dans les domaines de la culture, de l’économie, de l’environnement », précise Lina, soucieuse de son indépendance vis à vis des partis au pouvoir.
Trois ans après son lancement, Mada Masr contemple une Égypte qui ne cesse de restreindre la liberté d’expression. (...)
« Ce qui est important aujourd’hui, c’est de documenter ce qu’il se passe dans le pays sur le plan social et politique », estime Lina. Une préoccupation partagée par des journalistes venus d’Algérie, de Tunisie, de Syrie, du Liban ou de Jordanie, à l’occasion d’une rencontre initiée par le site d’information OrientXXI [1]. « Les révolutions ont ouvert les yeux sur une situation politique commune aux différents pays arabes, relève Ihsane El Kadi, directeur de Maghreb Emergent en Algérie. Nous avons connu l’ouverture politique, la guerre civile, la résilience. Qu’est-ce qu’il en reste aujourd’hui ? » A voir les journalistes présents autour de la table, une première certitude : toutes et tous entendent développer davantage de relations entre leurs rédactions dans les différents pays de la Méditerranée et du Proche-Orient.
Face à « une jungle de l’information où tout est prétexte à l’intox et à la propagande » (...)