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Mediapart
D’un enfer à l’autre : la double peine des réfugiés syriens en Turquie
#seisme #turquie #syrie
Article mis en ligne le 2 mars 2023
dernière modification le 1er mars 2023

Comme les Turcs, beaucoup ont tout perdu dans le séisme qui a dévasté le sud-ouest de la Turquie. Les exilés qui avaient fui le régime de Damas affrontent aujourd’hui un violent sentiment de rejet et s’inquiètent pour leur avenir dans le pays.

(...) Des centaines de personnes patientent pour entrer dans la province d’Idlib, en Syrie. Abir, la mère de Nour, tient fermement par la main son fils de 5 ans. Lui est né en Turquie. La famille louait un appartement qui a miraculeusement résisté au séisme. « Notre propriétaire turc nous a demandé de partir pour loger d’autres personnes. On est partis en laissant nos meubles et le reste de nos affaires, raconte Abir, les yeux cernés. Oui, j’ai peur de rentrer en Syrie, c’est un pays en guerre, mais on n’a pas d’autres options. Ici, en Turquie, il n’y a pas de logement pour nous. » (...)

Retrouver une dignité en rentrant dans leur pays déchiré par une guerre sans fin : Syriennes et Syriens expriment en nombre ce même désir de n’avoir plus à vivre comme des « invités » en Turquie. Ils y bénéficient d’une « protection temporaire » qui peut être révoquée à tout moment. Ce statut les assigne à résidence dans une ville et leur interdit de retourner en Syrie. Après le tremblement de terre, les autorités turques ont exceptionnellement levé cette interdiction : les Syriens installés sur leur territoire sont autorisés à rentrer pendant six mois maximum. 40 000 personnes auraient déjà franchi la frontière en moins de trois semaines, selon des chiffres communiqués par les autorités turques et du nord-ouest de la Syrie.

Mais pourront-ils vraiment revenir ? (...)

Un exil sans fin. (...)
Avant ce tremblement de terre dévastateur, les Syrien·nes installé·es en Turquie étaient déjà devenu·es un enjeu politique, à quelques mois de la présidentielle. En mai 2022, Recep Tayyip Erdoğan, en baisse dans les sondages, a annoncé un plan de retour « volontaire » pour au moins un million de personnes. Une tentative de réponse aux mouvements politiques d’opposition dominés par les ultranationalistes. Ces partis, comme Zafer ou le MHP (extrême droite), ont fait des Syrien·nes leurs boucs émissaires, les accusant notamment d’être responsables de la crise économique sans précédent qui frappe la Turquie.

Depuis plusieurs mois, les arrestations et les expulsions vers la Syrie se sont multipliées, selon l’ONG Human Rights Watch (...)

Des messages racistes sur les réseaux sociaux

Depuis le séisme, des rumeurs sans fondement inondent les réseaux sociaux. Les Syriens sont accusés d’être responsables d’une série de pillages dans la ville détruite d’Antakya, d’attaques à l’arme à feu de victimes turques, et même de viols. Sur Twitter, des messages ouvertement racistes circulent en toute impunité (...)

« À cause de ces messages, de nombreux Syriens ont commencé à avoir peur. Ils ont donc choisi de se faire discrets, de ne rien demander et de rester silencieux », explique Mahmoud, un activiste syrien qui vit en Turquie. (...)