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RESF
Courrier du 9 décembre de RESF 06 à Marisol Touraine
Article mis en ligne le 11 janvier 2013

Madame la Ministre,

Notre réseau de citoyen-ne-s est aux prises avec un trop grand nombre d’injustices touchant des personnes isolées et des familles qui font appel à notre aide.
Notre préoccupation, en vous écrivant, tient au sort des étrangers malades.

La notion d’ACCES aux soins doit prévaloir sur celle de l’EXISTENCE de ces soins dans le pays d’origine, contrairement à ce qu’avait décidé le gouvernement précédent.

Cette décision excluait en effet la plupart des étrangers du « droit au séjour pour étranger malade » en ce qu’elle faisait l’impasse sur la prise en charge sociale des soins dans les pays d’origine pourtant prise en compte par le Conseil d’Etat comme un facteur aggravant de la santé des intéressés. Autre facteur aggravant : l’éloignement géographique des lieux de soins comme cela est bien souvent le cas en Afrique.
Enfin, des pathologies fréquemment rencontrées comme le VIH, les hépatites, les maladies cardiologiques graves ou les cancers, ne sont pas soignées correctement ou ne le sont pas du tout dans nombre de pays. Le rapport de la COMEDE (guide de prise en charge médico-psychologique des migrants/étrangers en situation précaire-2008) est tout à fait clair à cet égard. C’est l’accès aux soins, sous tous ses aspects, qui doit être considéré par ceux et celles qui décident d’accorder le séjour en France d’étrangers malades.
La remise en cause des tests de « l’âge osseux » pour les mineurs étrangers s’impose comme une exigence éthique mais aussi scientifique

Ces tests sont, depuis longtemps, contestés par les associations, les médecins, et les radiologues. Cette pratique d’un autre âge (radiographie comparée à des modèles de références mis en place en 1935, sur des populations blanches, anglo-saxonnes) ne prend pas en compte la typologie géographique ou ethnique du mineur. Les tests de l’âge osseux doivent être abandonnés.

La prise en charge sanitaire des migrant-e-s ne va pas sans une prise en charge sociale de qualité

Nous demandons la fusion de la CMU et de l’AME. Cette dernière est une prise en charge au rabais de la santé des personnes concernées. L’expérience de terrain nous permet de témoigner des refus de soins à des bénéficiaires de l’AME et on ne compte plus les médecins spécialistes, les dentistes, les cabinets de radiologie, les laboratoires d’analyse médicale ou les cliniques qui se soustraient à l’obligation qui leur est faite d’accueillir et soigner ces patients. Médecins Du Monde ne cesse, avec nous, d’en témoigner.

Les difficultés administratives pour obtenir le bénéfice de l’Aide Médicale d’Etat, mais aussi de la CMU, CMU-C, sont inadmissibles et mettent en péril, à terme, l’équilibre sanitaire d’un territoire. Les pièces demandées ne sont pas prévues par la loi et l’octroi de cette prise en charge est trop souvent soumis à l’arbitraire. Il est urgent de former les personnels concernés dans le sens de l’application de la loi.
Ceci fait défaut à Nice.

Depuis des mois, les services de la CPAM mais aussi de la CAF réclament des documents revêtus de l’apostille qui ne peut être délivrée que par le pays d’origine ou ses représentations diplomatiques en France. Il est évidemment impossible aux demandeur-ses d’asile et aux réfugié-e-s de le demander sans se mettre en danger. Pourquoi faut-il encore compliquer le parcours administratif de ces personnes ?
On invoque le risque de fraude alors même que les demandeurs d’asile et leur famille sont parmi les personnes les plus contrôlées de France ! Il faut requalifier la protection sociale des étrangers malades.

Les modalités administratives du séjour des étrangers malades ou des accompagnants d’étranger malade constituent un accablement supplémentaire pour les migrant-e-s concernés.
L’administration « tolère » leur présence mais semble admettre difficilement leur séjour. L’Autorisation Provisoire du Séjour précarise les personnes en leur interdisant le travail et, dans certains cas, l’accès à des allocations. Les délais de réponse sont trop longs : de 4 à 6 mois dans ce département. Lorsqu’un enfant malade séjourne en France, seul l’un de ses parents est autorisé à l’accompagner.
La France, signataire de conventions internationales, se doit d’organiser le séjour et la survie de ces étrangers malades ou de leurs accompagnants dans des conditions plus humaines, respectueuses de la vie de famille et des droits des enfants. Un titre de séjour les autorisant à travailler doit leur être remis.

Beaucoup de textes, de pratiques et de regards restent à changer pour offrir aux malades étrangers le soutien sanitaire et social qu’on leur doit. Nous comptons sur vous et sur le gouvernement auquel vous participez pour rendre justice à ce flux migratoire si particulier.
C’est dans cet espoir que, nous vous prions d’agréer, Madame la Ministre, l’expression de nos sentiments respectueux.