
C’était le buzz de lundi 26 juin : le ministre de l’Agriculture Stéphane Travert voulait revenir sur l’interdiction des pesticides néonicotinoïdes. Pas Nicolas Hulot, ministre de la Transition écologique. Le Premier ministre a tranché en faveur de ce dernier. Mais l’affaire n’est pas close...
Préciser l’attitude face à l’Union Européenne
Affaire close ? Pas tout à fait.
Tout d’abord, les propos du ministre de l’Agriculture ont eu le mérite de permettre de le situer, alors qu’on lui connaît peu de prises de positions publiques dans son nouveau périmètre d’exercice. « Il a une vision ultra-économique de l’agriculture, et ne paraît pas très sourcilleux sur les questions de santé et d’environnement », relève Corinne Morel Darleux. La secrétaire nationale du Parti de gauche et conseillère régionale Auvergne-Rhône-Alpes suit ces dossiers de près.
Et puis, « le communiqué d’Édouard Philippe ne lève pas complètement les ambiguïtés », souligne-t-elle. En particulier, le dernier paragraphe du communiqué du Premier ministre, rappelle qu’« un travail est en cours avec les autorités européennes ». Un avertissement, selon Corinne Morel-Darleux : « M. Macron avait dit que le droit européen est supérieur. Sera-t-il capable d’aller à la désobéissance européenne quand les questions de santé publique et d’environnement sont en jeu ? »
C’est la même partie de ce communiqué qui a attiré l’attention de l’ex-ministre de l’Environnement et désormais députée PS Delphine Batho. Elle avait porté le texte ayant abouti à l’interdiction des néonicotinoïdes. « Notre loi ne pose aucun problème au niveau européen, rappelle-t-elle. Nous avons fait exprès de ne pas parler des néonicotinoïdes, mais des “produits contenant des substances néonicotinoïdes”. »
En effet, l’Union européenne (UE) a la compétence pour autoriser ou pas les substances actives, mais laisse le soin au pays de décider quels produits contenant ces substances actives sont autorisés ou pas. Exemple le plus connu : l’interdiction du Roundup — l’herbicide phare de Monsanto — serait de la compétence des États, alors que l’interdiction de sa substance active (le glyphosate) dépend de l’UE.
« C’est une question de volonté politique, il n’y a pas d’argutie juridique qui nous empêche d’interdire les produits contenant les néonicotinoïdes », assure Delphine Batho. Le gouvernement français pourrait, s’il le souhaite, conclure rapidement le travail « en cours avec les autorités européennes » évoqué par Édouard Philippe, et confirmer par là l’interdiction française des néonicotinoïdes. Le fera-t-il ? (...)