A Abidjan s’ouvrent les premiers grands procès de la crise postélectorale qui a secoué la Côte d’Ivoire en 2010-2011. Mais les partisans de l’ancien président Laurent Gbagbo dénoncent « le procès des vaincus par la justice des vainqueurs ». De quoi mettre en péril une stabilité encore précaire.
Comment concilier le besoin de justice et la nécessité d’une réconciliation ? C’est bien le dilemme auquel sont confrontés les Ivoiriens, avec l’ouverture, début octobre dernier, des premiers procès supposés liquider les contentieux de la crise postélectorale qui a déchiré le pays des Eléphants en 2010-2011. Près de dix-huit mois plus tard, la Côte d’Ivoire reste sous tension, quoi qu’en disent les autorités.
Un seul consensus parmi la population : des crimes ont été commis par les deux camps qui s’affrontaient, celui du Président de l’époque, Laurent Gbagbo, et celui de l’actuel chef de l’Etat, Alassane Ouattara. Et la majorité des Ivoiriens estiment que justice doit être rendue.
Mais nombreux sont ceux qui reprochent à ces jugements à venir leur côté trop sélectif. (...)
Certes, la Cour pénale internationale (CPI) – qui s’apprête à juger Laurent Gbagbo – a exigé de la justice militaire ivoirienne qu’elle se penche aussi sur les crimes commis lors de la tentative de coup d’Etat menée en 2002 par Guillaume Soro, l’actuel président de l’Assemblée nationale.
Cependant, cela n’a pas suffi à apaiser la colère des partisans de Laurent Gbagbo, qui ne comprennent pas que ces mêmes rebelles aient été graciés voilà dix ans par leur « champion », et que celui-ci soit maintenant détenu à La Haye.
La grande inconnue, pour les Ivoiriens, est surtout de savoir jusqu’où Alassane Ouattara respectera les promesses de son discours sur la fin de l’impunité, prononcé lors de son investiture le 21 mai 2011 à Yamoussoukro, la capitale politique. Il a maintes fois réitéré son intention d’en finir avec une justice à deux vitesses, a fortiori devant la communauté internationale, dont le soutien lui est capital. (...)