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Contester librement la politique israélienne ? Un droit qui reste à conquérir.
Article mis en ligne le 13 février 2018

A-t-on le droit de contester la politique israélienne ? C’est le thème d’un colloque qui a lieu lundi 12 février au Sénat. Et c’est la question que posent dans cette tribune Pascal Boniface, Rony Brauman, Ivar Ekeland, Bertrand Heilbronn, Christiane Hessel, Renée Le Mignot et Dominique Vidal.

A-t-on le droit, en France, de contester la politique israélienne, de condamner son mépris du droit international, de dénoncer les injustices subies par le peuple palestinien ? Et ce, dans une période où le peuple palestinien est de plus en plus menacé par la colonisation, les projets d’annexion, le projet de redéfinir la nature même de l’Etat d’Israël ?

En théorie, rien ne nous empêche de nous exprimer, mais qu’en est-il en pratique ?

Quiconque a envie de contester la politique israélienne va se poser la question des attaques auxquelles il ou elle risque d’être confronté : insultes, intimidation, pressions, amalgames, délégitimation, accusations infâmantes d’antisémitisme. Qui va prendre ce risque, avec une carrière politique ou journalistique à construire ? Les expressions se font rares, et parfois les portes se ferment sans autre raison. C’est une forme de peur et d’autocensure qui s’installe…

L’intimidation ? Savez-vous que l’un de nous, directeur d’un centre de recherches stratégiques, 16 ans après avoir écrit une note interne au Parti socialiste sur l’orientation de sa politique israélo-palestinienne, est toujours soumis aux attaques de ses détracteurs, y compris d’un ancien Premier ministre ?

Les pressions et les interdictions ? Avez-vous entendu parler de l’interdiction faite à des élus de la République de se rendre en Israël, en novembre dernier, sous prétexte qu’ils avaient demandé à rendre visite à Marwan Barghouthi, le Mandela palestinien, dans la prison où il est détenu par Israël ? Et vous souvenez-vous aussi, de la « liste noire », publiée début janvier, des organisations dont les dirigeants peuvent désormais être refoulés par l’Etat d’Israël, rendant impossible leur accès à la Palestine occupée ?

Les amalgames ? Savez-vous que les inconditionnels de la politique israélienne font la promotion d’une « définition » de l’antisémitisme qui prendrait en exemple la critique « excessive » de la politique israélienne ? Insulte au combat antiraciste, l’adoption d’une telle définition, sous quelque forme et à quelque niveau que ce soit, ferait des ravages vis-à-vis de la liberté d’expression. Avez-vous lu l’interview du président du Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF), demandant que cette « définition » soit inscrite dans la loi, transformant ainsi une opinion en délit ?

La délégitimation ? Mesurez-vous les effets, sur la liberté d’expression et d’action citoyenne, des tentatives de diabolisation des campagnes de Boycott-Désinvestissement-Sanctions (BDS), que chacun a le droit d’approuver ou non, mais qui ne sont qu’un moyen pacifique de tenter d’imposer le droit ?

Que faire face à ces attaques et tentatives de délégitimation ? La première chose est d’étudier la question en profondeur (...)

Nous attendons du Président de la République qu’il cesse d’encourager et reprendre les amalgames (notamment entre antisionisme et antisémitisme), qu’il rejette clairement la projet de donner une définition, de surcroît manipulée, de l’antisémitisme, qu’il donne des limites claires au débordement des approches communautaristes, et qu’il soit le garant de notre liberté d’expression et d’action citoyenne.

Nous attendons des signes forts dans ce sens, et nous y serons particulièrement attentifs dans les semaines et les mois qui viennent.

Face à la politique irresponsable du gouvernement israélien et de son allié états-unien, qui risque encore de connaître de nouveaux développements, la France a besoin d’un débat citoyen, démocratique, un débat qui peut être vigoureux mais doit être exempt d’attaques personnelles et de coups bas. Nous y veillerons.