
Le rapport sur les retraites, « Nos retraites demain : équilibre financier et justice »[1], présenté le 14 juin 2013 par Mme Yannick Moreau au Premier Ministre obéit à la tradition de ce type de rapport. On y trouve une multitude de renseignements forts utiles pour le débat public, confirmant souvent les craintes exprimées par les mouvements sociaux opposés aux précédentes réformes, notamment ceux de 2003 et 2010, validant ainsi beaucoup de leurs arguments. Mais, hélas, presque tous les attendus sont oubliés lorsque les auteurs du rapport en viennent aux recommandations pour la réforme que projette le gouvernement à l’automne prochain.
(...) C’est ici que la philosophie générale du rapport Moreau apparaît clairement. Le gros de l’effort, la plus grande partie du rééquilibrage des ressources des caisses de retraites doivent se réaliser au sein de la masse salariale, c’est-à-dire entre les travailleurs, actuels ou anciens. En effet, il faut rester dans les clous des dogmes de la Troïka (FMI, BCE, CE). Autrement dit, réduire les dépenses à tout prix et surtout pas de nouvelle recette d’envergure : « la réflexion sur le niveau et la nature des ressources des systèmes de retraites à long terme ne peut guère être conduite indépendamment de la prise en considération de nos prélèvements obligatoires, des assiettes sur lesquelles ils reposent et des dépenses qu’ils financent. Le Haut Conseil pour le financement de la protection sociale mène actuellement des réflexions sur ces sujets, qui dépassent le champ de responsabilité de la commission. » (p. 108) Ben, voyons !
Il ne sera donc jamais question de revoir la répartition des revenus entre capital et travail, sauf à la marge. N’est-ce pas là l’essentiel ? Les récriminations du Medef pour fustiger la moindre hausse des cotisations à la charge des entreprises, aussi minimes soient-elles, ne seront là que pour tromper les gogos. (...)