Les séismes peuvent évoluer de manière sourde et suivant de lents déplacements des plaques tectoniques. Ce qui ne favorise pas leur prévision.
La très belle ville d’Istanbul est bâtie en bordure de deux plaques continentales qui coulissent continuellement l’une par rapport à l’autre. Au Nord, la plaque européenne limitée au Sud par la mer de Marmara et la baie d’Izmit vers l’Ouest. Au Sud, le bloc anatolien. C’est le domaine de la faille Nord Anatolienne (NAF) qui s’étend sur plus de 1.200 km vers l’Est, et qui se déplace de 2,5 cm/an vers l’Est, par rapport à la plaque Europe, stable. Les séismes sont fréquents au long de cette faille, avec une récurrence d’une dizaine d’années et un déplacement des séismes vers l’Ouest. (...)
En 1999, un séisme important a frappé Izmit, à seulement une quarantaine de kilomètres d’Istanbul. De magnitude 7,2, il a tué 17.000 personnes. Depuis cette date, il ne s’est rien passé ou presque. Et pourtant, dans un récent article, un groupe de chercheurs de Potsdam, à côté de Berlin, vient de révéler que la faille NAF se déplace toujours, mais silencieusement.
Il ne s’agit pas là d’un phénomène unique dans l’histoire, mais sa mise en lumière est, elle, relativement récente. (...)
À chaque déplacement lent correspond des mouvements du sol, à très basse fréquence (0,05-5 Hz) alors que les séismes « ordinaires » sont plutôt dans la gamme 10-20 Hz.(...)
Ces séismes se caractériseraient par de petites surfaces de rupture, de l’ordre de la centaine de mètres, et des chutes de contraintes faibles (...)
C’est une évolution irréversible : une fois déformé, le matériel ne revient pas à sa forme initiale, contrairement à la déformation élastique. Essayez en tordant une petite cuillère : impossible de la faire revenir à son état premier. (...)
Cette déformation ductile est continue, le matériel plie, mais ne rompt point. Et pourtant, si l’on regarde de près le « chapeau de gendarme », on peut y voir des fractures dans les différentes couches, donc des discontinuités. Alors, plis ou cassures ? Les deux à la fois. Tout dépend de la contrainte appliquée, ou plutôt de la variation de contrainte dans le temps, c’est-à-dire de la vitesse à laquelle elle est appliquée. Il existe aussi des effets de température. On tord plus facilement les petites cuillères à chaud. Et à froid, elles se cassent plus facilement.
Revenons maintenant à la NAF. Il semblerait que l’on puisse y détecter une nouvelle façon pour la croûte terrestre de se déformer. Et naturellement, difficilement prévisible.