
« Le langage, c’est le pouvoir, écrit l’essayiste et activiste féministe américaine Rebecca Solnit. […] S’il vous manque les mots pour définir un phénomène, une émotion, une situation, alors vous ne pouvez pas en parler, ce qui veut dire que vous ne pouvez pas non plus vous rassembler pour évoquer ces problèmes et encore moins y apporter des solutions. […] C’est peut-être particulièrement vrai du féminisme, un mouvement attaché à donner une voix et du pouvoir à ceux et celles qui n’ont ni l’un ni l’autre. » (...)
« Ces hommes qui m’expliquent la vie ». Solnit y fait le récit piquant et agacé d’une soirée passée chez les heureux du monde, « sur les hauteurs pentues et boisées d’Aspen », durant laquelle un homme s’évertua à lui exposer doctement, et avec force condescendance (« avec ce regard suffisant que j’ai si souvent vu chez les hommes qui dissertent, les yeux fixés sur l’horizon flou et lointain de leur propre autorité »), les raisons de l’importance d’un ouvrage historique… dont elle était l’auteure. (...)
un ancrage très direct dans l’expérience, un regard clairvoyant, une intelligence déliée et engagée, une limpidité du propos, de l’humour quand le moment s’y prête — c’est-à-dire pas toujours, l’ironie le cédant par force à l’impatience ou à la colère devant l’état des lieux de la domination masculine, de ses manifestations les plus subreptices comme les plus brutales, que constituent ensemble les neuf essais rassemblés dans cet opus aussi mince que nerveux. (...)