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Attac 33
Capitalismus toxicus
Lz P’tit Grain N° 208/Jean-Luc Gasnier
Article mis en ligne le 28 septembre 2012

La récente polémique et le vacarme médiatique provoqués par la publication de l’étude du professeur Gilles-Eric Séralini concernant les effets délétères du maïs Monsanto NK 603 ( traité ou non au Roundup) mettent en évidence l’absence d’une autorité incontestée et indépendante dans le domaine de l’évaluation des risques sanitaires en France

Cette carence jette la suspicion sur toutes les études publiées à ce sujet et les citoyens se trouvent confrontés, comme d’ailleurs dans le domaine du nucléaire, à des déclarations contradictoires, opposant les « pro » et les « anti ». Des associations comme le CRIIGEN et la CRIRAD tentent de développer et de vulgariser une expertise indépendante mais sans grands moyens et sans bénéficier de soutiens puissants. L’Etat n’assumant pas son rôle d’acteur impartial et garant de l’intérêt public, le risque est évident de voir se développer un travail de lobbying et de désinformation encore plus systématique et déterminé de la part des firmes. L’affaire du maïs NK 603 de Monsanto montre que la défense et la démarche « marketing » de la multinationale sont malheureusement relayées complaisamment par toute une kyrielle de journalistes « pseudo-scientifiques » qui n’hésitent pas à citer des experts dont les liens avec l’industrie peuvent très facilement et très rapidement être vérifiés ( par un simple clic sur un moteur de recherche). Ainsi, dans un article de Médiapart intitulé « OGM, une étude fait beaucoup de bruit pour presque rien », le journaliste Michel de Pracontal reprend à son compte les doutes émis par des scientifiques comme le professeur Mark Tester, spécialiste de la génétique des plantes à l’université d’Adélaïde, dont les liens avec les industriels de la biochimie figurent clairement sur le site de l’université d’Adélaïde(ici). On peut y lire notamment : “His commercial acumen is clear from his establishment of private companies and successful interactions with multinational companies such as Monsanto, Syngenta, Bayer and Pioneer-DuPont. He is a Director of Australia’s largest wheat breeding company, Australian Grains Technologies.” .Ce professeur, cité par Michel de Pracontal, n’hésite pas à déclarer : « Si les effets sont aussi importants, et si les conclusions de l’étude s’appliquent aussi aux humains, pourquoi les Nord-Américains ne tombent-ils pas comme des mouches ? » Ce type d’argument, fréquemment repris par l’industrie, démontre la malhonnêteté intellectuelle de cet « expert » sous influence car il feint d’ignorer la différence fondamentale entre toxicité aigüe et toxicité chronique. La toxicité des OGM relève évidemment du second type et les effets d’une alimentation polluée par les OGM ne pourront évidemment s’apprécier qu’au bout d’une longue période et seront toujours contestables voire invérifiables en pratique car dilués dans une pollution plus générale . Ce qui est certain c’est qu’on ne verra jamais personne « tomber comme une mouche » après ingestion d’un OGM ! Certaines critiques émanant de la communauté scientifique – concernant notamment le nombre de rats, l’interprétation des données, la présence de biais statistiques- paraissent plus pertinentes mais relèvent véritablement du débat d’experts ; elles nécessitent une compétence particulière et ne sont pas immédiatement compréhensibles par le grand public.

Néanmoins, sans être un spécialiste, le simple citoyen peut légitimement se poser un certain nombre de questions :

 comment justifier que les études de toxicité visant à mettre en évidence des maladies dégénératives qui ne se déclenchent qu’après une longue exposition soient menées sur des durées courtes (3 mois sur le rat de laboratoire Rattus norvegicus dont l’espérance de vie est de 3 ans en moyenne ) ?

 Comment justifier que les études et les dossiers toxicologiques soient pris en charge par les firmes elles-mêmes lors des demandes d’autorisation de mise sur le marché auprès des autorités d’agrément. ? Comment ne pas s’inquiéter de la diminution des crédits de recherche publique et des partenariats de plus en plus fréquents entre laboratoires universitaires et sociétés privées ? . . .

Ces questions jettent le trouble et la suspicion car, derrière ces anomalies, le citoyen perçoit confusément l’emprise progressive de multinationales comme Monsanto sur le domaine public et la promotion d’intérêts privés au détriment de l’intérêt général.

Aujourd’hui, la détérioration de nos conditions de vie est le résultat d’un environnement toxique créé par les grands conglomérats industriels et financiers : les OGM sont toxiques, les pesticides sont toxiques, les emprunts sont toxiques . . . L’époque est toxique car la société capitaliste est plus toxique que jamais : pour satisfaire son appétit de rentabilité immédiate, le capitalisme financier obère l’avenir. Le paradoxe est que bien souvent, les décideurs nous promettent toujours la récompense de nos efforts pour demain, pour un long terme qu’ils ignorent, pour un futur qu’ils compromettent de plus en plus. Remboursez vos dettes, travaillez sans compter et demain, la croissance revenue, vous pourrez enfin toucher le fruit de vos efforts . Jusqu’à une époque récente, cette promesse fonctionnait ;

désormais le boniment est éculé et l’inquiétude pointe car, dans tous les domaines, les effets de la toxicité chronique du capitalisme sont perceptibles et les symptômes sociaux et environnementaux d’une maladie dégénérative qui touche l’ensemble de la planète se multiplient. Attention, nous ne sommes pas des rats de laboratoire . . .