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CNCDH : Avis sur le régime d’asile européen commun
Article mis en ligne le 12 décembre 2013

1. A la suite de l’adoption par le Conseil européen du programme de Stockholm, le traité de Lisbonne a confié à l’Union européenne (UE) la tâche de développer « une politique commune en matière d’asile, de protection subsidiaire et de protection temporaire visant à offrir un statut approprié à tout ressortissant d’un pays tiers nécessitant une protection internationale et à assurer le respect du principe de non-refoulement » (article 63.1) (1). Après cinq années de négociations, le conseil de l’UE (Justice et affaires intérieures) et le Parlement ont adopté en juin 2013 les textes révisés des directives « Accueil » et « Procédures » devant être transposées d’ici à juillet 2015 (2), du règlement « Dublin III » directement applicable à compter de janvier 2014 (3) et du règlement « Eurodac » directement applicable à compter de juillet 2015 (4). La refonte de la directive « Qualification » avait eu lieu en 2011, le délai de transposition étant fixé au 21 décembre 2013 (5).

2. Le 16 juillet 2013, le ministre de l’intérieur a initié une concertation nationale sur la réforme du droit d’asile. Un projet de loi est annoncé pour la fin de l’année.

3. La forte médiatisation d’affaires relatives à des étrangers déboutés de leur demande d’asile conjuguée à la survenance récente d’événements tragiques aux frontières de l’espace Schengen laissent craindre que les pouvoirs publics ne soient tentés, dans le cadre de la politique de contrôle des flux migratoires, de prendre des mesures de plus en plus restrictives concernant l’exercice du droit d’asile à l’occasion de la préparation de la réforme.

4. En effet, la prolifération de discours sécuritaires « affolant » l’opinion publique risque d’entraîner un repli identitaire, voire xénophobe, qui ne pourra que porter préjudice à l’exercice du droit d’asile en provoquant un climat de suspicion généralisée à l’encontre de ceux qui sollicitent une protection internationale. Dans ce contexte, les craintes exprimées d’afflux massif doivent être ramenées à de plus justes proportions. A cet égard, la CNCDH tient à rappeler que le nombre de demandeurs d’asile au sein de l’Union européenne (à peine supérieur à 330 000 en 2012, selon Eurostat) reste dérisoire au regard de la population et de la puissance économique des pays composant l’Union (6).

5. S’agissant de la France, il convient de souligner, pour savoir raison garder, la relative stabilité du nombre des bénéficiaires d’une protection internationale au titre de l’asile, soit 176 984 personnes en 2012 (rapport OFPRA 2013), qui reste très inférieur au nombre des bénéficiaires de cette protection en 1953 (224 829 réfugiés reconnus) et comparable à celui de 1993 (165 531 réfugiés, source OFPRA). Si ces chiffres démentent la réalité d’un afflux massif, il faut rappeler que le souci de répondre à un tel afflux est déjà pris en compte par le droit de l’Union qui a institué une protection temporaire (7), procédure restée jusqu’à ce jour inappliquée (8).

6. A cette occasion, il est de la responsabilité de la CNCDH de rappeler les grands principes gouvernant le droit d’asile, dont la protection est d’abord conventionnelle. Elle découle de la convention de Genève sur les réfugiés du 28 juillet 1951 qui, sans exiger des Etats l’octroi d’un asile aux réfugiés, leur impose une double obligation, d’une part, de non-refoulement vers un pays où leur vie ou leur liberté serait menacée pour l’un des motifs de la convention (article 33-1), d’autre part, d’immunité pénale pour leur entrée au séjour irrégulier (article 31-1), qui constitue les principes cardinaux du droit des réfugiés (9). L’on doit à la Charte des droits fondamentaux de l’UE d’avoir consacré le « droit d’asile » en tant que droit fondamental en l’amarrant à la convention de Genève et au traité instituant la Communauté européenne (article 18). Le droit dérivé de l’Union a quant à lui reconnu un « droit à l’asile » tant aux réfugiés qu’aux bénéficiaires de la protection subsidiaire (article 24 de la directive « Qualification »). (...)