Dans une déclaration adoptée à l’unanimité, y compris par la Chine et la Russie, le Conseil de sécurité de l’ONU a appelé mercredi la junte birmane à "faire preuve de la plus grande retenue" face aux manifestants. De son côté, Washington a sanctionné les enfants adultes du chef de la junte. (...)
Le Conseil de sécurité de l’ONU a "fermement" condamné, mercredi 10 mars, les violences contre le mouvement de contestation en Birmanie, où plusieurs centaines de policiers et de soldats ont lancé un raid à Rangoun contre des cheminots grévistes opposés à la junte.
Les États-Unis sont également intervenus, en instituant des sanctions contre deux enfants adultes du dirigeant de la junte qui s’est emparé du pouvoir, Min Aung Hlaing. Aung Pyae Sone et Khin Thiri Thet Mon ont des intérêts dans des entreprises qui ont directement bénéficié "de la position de leur père et de son influence néfaste", a indiqué le département américain du Trésor.
Dans sa déclaration adoptée à l’unanimité des 15 membres, donc également par la Chine et la Russie, des alliées traditionnelles des généraux birmans, l’organe exécutif des Nations unies s’en est pris de manière inédite à l’armée qu’il appelle à "faire preuve de la plus grande retenue".
Dénonçant les agissements violents des forces de sécurité "contre des manifestants pacifiques, incluant des femmes, des jeunes et des enfants", le Conseil demande aux parties de "chercher une solution pacifique" à la crise provoquée par le coup d’État du 1er février. Il réclame en outre "la libération immédiate de toutes les personnes détenues arbitrairement", sans toutefois mentionner la possibilité de sanctions internationales.
La Chine estime qu’"il est maintenant temps de procéder à la désescalade" en Birmanie et qu’"il est temps de dialoguer", a affirmé mercredi l’ambassadeur chinois à l’ONU, Zhang Jun. "L’heure est à la diplomatie", a-t-il aussi souligné dans un communiqué, en affirmant que "la Chine avait participé à la négociation" organisée pendant six jours par le Royaume-Uni au sein du Conseil de sécurité pour cette déclaration "d’une manière constructive". "Il est important que les membres du Conseil parlent d’une seule voix. Nous espérons que le message du Conseil sera de nature à améliorer la situation en Birmanie", a insisté le diplomate chinois.
La répression se poursuit (...)
Médecins, enseignants, employés des compagnies d’électricité, cheminots, de nombreux fonctionnaires ont cessé le travail après le putsch qui a renversé le gouvernement civil d’Aung San Suu Kyi. Les principaux syndicats ont appelé à "l’arrêt complet de l’économie" pour tenter de paralyser la Birmanie et d’augmenter la pression sur les militaires.
"Une centaine d’interpellations"
La junte a, quant à elle, ordonné aux fonctionnaires de reprendre le travail, faute de quoi ils seraient licenciés et s’exposeraient à des représailles, tandis que les manifestations sont quotidiennes dans tout le pays.
Mercredi, une forte présence policière et militaire était d’ailleurs visible à travers Rangoun. Des barricades de fortune érigées par les contestataires ont été incendiées et, dans le quartier d’Okkalapa, il a été procédé à "une centaine" d’interpellations, d’après un secouriste. "Certains manifestants ont été battus, il y a des blessés".
Au moins 60 civils ont été tués et près de 2 000 personnes arrêtées depuis le 1er février, d’après l’Association d’assistance aux prisonniers politiques.
Réfugiés en Inde
Les députés du parti d’Aung San Suu Kyi, la Ligue nationale pour la démocratie (LND), qui ne reconnaissent pas la légitimité du coup d’État et ont créé un comité pour représenter le gouvernement civil, se rendent coupables de "haute trahison", un crime passible de la peine de mort ou de 22 ans de détention, a récemment averti la junte.
Deux responsables de la LND sont morts en détention ces derniers jours, très peu de temps après leur interpellation. Beaucoup ont été arrêtés, dont trois la nuit dernière. L’ex-président de la République, Win Myint, et l’ancienne cheffe du gouvernement, Aung San Suu Kyi, ont été mis au secret.
Les médias indépendants sont également pris pour cible. Plusieurs ont été visés par des opérations de police et une vingtaine de journalistes sont en détention.
Dans ce contexte, au moins 136 Birmans se sont réfugiés en Inde depuis le coup d’État et des dizaines d’autres attendent à la frontière avec ce pays de pouvoir le faire, ont annoncé les autorités indiennes.