
Comme toute organisation aujourd’hui, un acteur public utilise l’informatique pour préparer toutes ses décisions, produire tous ses services, évaluer toutes ses actions. Et l’informatique traite des données : par exemple, des fonds de cartes et des informations attachées aux cartes, des statistiques, des descriptions de services et de lieux publics, des mesures, des études et rapports, des barèmes, des textes réglementaires, des informations temps réel, et de bien d’autres choses. Ces informations sont la matière première de l’action publique. Mais elles pourraient aussi bénéficier à d’autres acteurs publics, ainsi qu’à des entreprises innovantes, des associations, des chercheurs, des citoyens. C’est l’idée qui sous-tend la directive européenne sur la “réutilisation des données publiques” (2003), transcrite en droit français en 2005 sous la forme d’une révision de la loi du 17 juillet 1978 sur l’” amélioration des relations entre l’administration et le public” : les ”données publiques”, financées par l’impôt, doivent pouvoir être réutilisées par d’autres acteurs, au service de la qualité des services sur le territoire, de la croissance économique, de la connaissance et du débat démocratique.
Vous aurez compris qu’il s’agit de favoriser l’innovation par la mise à disposition de données réutilisables, selon une définition assez maximaliste de la notion de données ouvertes(...)
L’ouverture des données publiques n’est pas une option pour les acteurs publics : elle est rendue obligatoire par des directives européennes et une législation française qui en a fait un droit opposable. Citoyens, associations, entreprises, sont en droit d’exiger que les “données publiques” leur soient délivrées pour qu’ils en fassent leur propre usage, y compris commercial.
Mais cette ouverture constitue également une chance. En s’y engageant, les acteurs publics ont l’occasion de gagner en efficacité, en mutualisant leurs propres bases de données : combien de départements d’une même administration, combien d’administrations d’un même territoire, dupliquent-ils les mêmes bases de données, les mêmes cartes, les mêmes statistiques, évidemment pas tout à fait cohérentes entre elles ?
L’ouverture des données publiques peut également contribuer au développement économique et à l’amélioration de nombreux services aux habitants comme aux entreprises : en permettant à desacteurs de proximité de mieux répondre aux besoins particuliers de tel quartier, de telle catégorie de population, de tel bassin d’emploi, on crée de l’activité tout en améliorant la qualité de vie.(...)
En somme, si la loi impose de libérer des données publiques, pourquoi n’impose-t-elle pas aussi aux entreprises de libérer les données privées alors même que l’informatique dans les nuages est sur le point de prendre une ampleur jamais vue ? Signe des temps, cette redéfinition des rapports publics-privés en matière de données ne s’accompagne pas suffisamment d’une politique de régulation et de gouvernance partagée, enjeu majeur du siècle qui s’ouvre.(...) Wikio