
Secrétaire d’État chargé des anciens combattants et de la mémoire sous le quinquennat de François Hollande, le sénateur PS Jean-Marc Todeschini dénonce « le bruit médiatique d’un président de la République qui mêle confusément cérémonies patriotiques et visées électoralistes » et s’inquiète du sens de l’action d’Emmanuel Macron sur les questions mémorielles.
Le 11 novembre n’est pas un jour de victoire, ni même de paix. Le 11 novembre est un jour de deuil en France et dans le monde. Le deuil de plusieurs millions de morts, de blessés et d’invalides.
Dans la mémoire de notre pays, c’est le plus grand deuil que nous ayons eu à porter car cette guerre a marqué, et marque encore, de sa trace indélébile chaque commune, chaque famille. Cette journée singulière appelle donc au recueillement et au respect des morts.
En aucun cas, il ne doit être troublé par le bruit médiatique d’un Président de la République qui mêle confusément cérémonies patriotiques et visées électoralistes à travers un périple dans des territoires oubliés par la politique du gouvernement depuis deux ans. Les morts pour la France, leurs familles et l’ensemble des Françaises et des Français n’ont pas besoin de gesticulations et de petites phrases d’un Président de la République qui vagabondent sur les routes de France, fussent-elles celles du front occidental de la Grande Guerre. (...)
A l’approche du 11 novembre 2018, je me questionne sur le sens de l’action du Président de la République sur les questions mémorielles.
Pourquoi avoir voulu programmer et assister à une cérémonie en hommage aux huit maréchaux de la Grande Guerre à l’Hôtel national des Invalides le 11 novembre au matin ? Quelle nécessité y a-t-il pour un Président de la Vème République de vouloir rendre légitime un hommage républicain à celui des huit qui, il n’y a même pas 80 ans, a mis à bas cette même République pour imposer aux Français un régime autoritaire, fasciste et antisémite ?
Monsieur le Président de la République, vous avez ainsi, par cette seule volonté, effacé d’un geste cinq ans de paix des mémoires, cinq ans d’hommage à tous les combattants, cinq ans pendant lesquels la mémoire d’un tirailleur sénégalais, d’un soldat bavarois ou d’un capitaine de Saint-Cyr étaient à égalité. Vous revenez à la France de la Chambre bleu-horizon de l’après-guerre, au culte des maréchaux de l’entre-deux-guerres dont l’histoire nous a appris à quoi il avait mené.
Monsieur le Président de la République, j’aurai aimé que vous suiviez l’exemple de vos prédécesseurs sur cette question (...)
Monsieur le Président, l’Histoire ne s’est pas arrêtée le 11 novembre 1918. S’il appartient aux historiens de l’écrire, les mémoires sont quant à elles notre bien collectif et elles ne peuvent être oubliées. Après 1918, il y a eu le 10 juillet 1940 et quatre sombres années qu’aucun passé, fusse-t-il considéré comme glorieux, ne saurait effacer. La République ne peut pas honorer quelqu’un qui a agi contre la République.
Nous savons désormais que dans votre « en même temps » mémoriel, Monsieur le Président de la République, Maurice Audin vaut bien Philippe Pétain.