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Arnaud Montebourg essaie de vendre des centrales nucléaires à un pays arabe des plus fragiles
Article mis en ligne le 29 novembre 2013
dernière modification le 27 novembre 2013

Le ministre français rêve de vendre des centrales nucléaires à l’Arabie saoudite. Mais ce pays est en grande difficulté, et son avenir incertain : fragilité politique, agriculture en chute, consommation excessive d’eau et de pétrole. Un client pas vraiment fiable.

(...) Acteur incontournable de l’énergie mondiale, premier producteur et exportateur de pétrole, l’Arabie Saoudite donne une impression de puissance inégalée, voire inégalable car elle est la pile qui permet au coeur de l’économie mondiale de continuer à battre avec une certaine régularité. Grâce à ses immenses réserves et à sa capacité à moduler sa production pétrolière en fonction du prix, elle joue un rôle de régulateur et est au centre de l’attention des pays importateurs et principalement des Etats-Unis qui entretiennent avec elle des relations étroites depuis les années 1930. Mais ce pays de la démesure pourra-t-il préserver cette puissance longtemps ?

Difficultés de gouvernance

L’organisation de la succession au trône de la monarchie saoudienne permet difficilement de répondre aux défis auxquels le royaume est confronté actuellement. (...)

La gestion rentière basée sur l’importation de tous les biens de consommation afin de répondre à la demande d’une population très jeune (1/3 de la population a moins de 14 ans et l’âge médian est de 21,4 ans) et en très forte croissance (multipliée par trois en 30 ans), va provoquer un déséquilibre progressif de la balance fiscale qui deviendrait déficitaire vers 2022. Si le prix du baril descend en dessous de 80$, l’Arabie Saoudite plongerait encore plus rapidement vers son seuil de déficit. L’absence de diversité dans les recettes de l’Etat rend l’Arabie Saoudite extrêmement vulnérable à un effondrement des cours, hypothèse hautement probable en cas de récession mondiale. (...)

Le pays est contraint d’engager une réforme politique profonde s’il veut réduire ses dépenses, diversifier l’économie, créer de l’emploi pour la population jeune et finalement inverser les tendances pour éviter un effondrement de son économie. La situation est donc très complexe pour le premier producteur mondial de pétrole qui fait face à d’énormes défis politiques sans disposer d’un mode de gouvernance suffisamment efficace pour y répondre.

Le problème de l’eau

L’Arabie Saoudite n’a plus assez d’eau. Peu de pluie, absence de lacs et de rivières, ce territoire aride dispose uniquement de réservoirs souterrains ou d’eau de mer dessalée. Le plus étonnant, c’est que la consommation d’eau moyenne y est deux fois supérieure à la moyenne mondiale et chaque habitant consomme 265 litres d’eau (150 litres en moyenne pour un Français). C’est d’autant plus alarmant que la consommation augmente trois fois plus vite que la population. Pour ne rien arranger, la dégradation du réseau provoquerait, dans certaines régions, plus de 50% de pertes. (...)

Cela pose évidemment la question de la production alimentaire pour nourrir une population toujours plus nombreuse. En effet, l’agriculture consomme 80% de l’eau « produite » par les installations du royaume alors qu’elle ne fournit que 20% de l’alimentation et de manière très intensive, à l’image de la ferme Al Safi qui abrite plus de 37 000 vaches laitières sur 3500 hectares (en partenariat avec Danone !). D’immenses zones de cultures irriguées apparaissent en plein désert pour produire les fourrages qui vont nourrir les vaches entassées dans des entrepôts situés à proximité. Ces installations peuvent être observées avec google map®.

Le destin de telles installations sera surement le même que la production intensive de blé initiée dans les années 1980. Depuis 1990, la production a été divisée par quatre à cause du manque d’eau et la tendance ne s’inverse pas. L’autosuffisance acquise en dix années seulement aura été aussi impressionnante qu’éphémère. (...)