
Naguère brisées, les mains du caricaturiste syrien Ali Ferzat peuvent aujourd’hui en serrer d’autres. Elles peuvent de nouveau porter un verre à ses lèvres, soulever un paquet. Elles peuvent aussi et surtout dessiner.
(...) Ils n’auront pas atteint leur but. Huit mois plus tard, la pointe du feutre noir qu’Ali Ferzat a constamment dans sa poche donne toujours vie à des croquis piquants contre Bachar el-Assad et ses alliés.
L’image d’un homme au visage tuméfié, à l’œil gauche abîmé et aux mains bandées, qui avait fait le tour de la Toile, est bien loin. De passage en France, Ali Ferzat est méconnaissable : sa barbe grisonnante finement taillée est fendue d’un large sourire, son œil bleu opalin se fait tantôt grave, tantôt malicieux. La rééducation aura eu raison des coups et des brûlures. (...)
L’engagement d’Ali Ferzat pour la révolution ne s’est pas fait sans heurt dans la communauté artistique syrienne. Une partie a publié dans Tishreen, un journal gouvernemental, un texte le calomniant, arguant qu’en étant contre Bachar el-Assad, Ali Ferzat était contre la nation syrienne.
Le dessinateur ne s’est pas laissé intimider. Droit sur sa chaise, l’air sérieux, il garantit ne pas porter la moindre attention à ces attaques personnelles. Pour lui, assure-t-il, seule la nation syrienne compte. Malgré les conséquences, se battre (avec un stylo) pour contribuer à rendre son futur meilleur reste à ses yeux une évidente priorité.