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Libération
A la tête des théâtres, des hommes succèdent aux hommes
Article mis en ligne le 29 mars 2021
dernière modification le 28 mars 2021

Alors que les théâtres occupés crient la détresse des scarifié⋅es de la crise sanitaire à l’oreille d’un gouvernement sourd, à trois mois des élections régionales et départementales, les nominations à la tête des centres dramatiques nationaux (CDN) pleuvent. La seule femme aux commandes dans ce jeu de chaises musicales semble être la ministre elle-même 

Un cortège d’hommes succèdent à des hommes ou s’interchangent, sans aucune surprise.

De rares femmes passent entre les mailles du filet, à l’image de la metteuse en scène Julie Deliquet, au Théâtre Gérard-Philipe à Saint-Denis depuis mars 2020. A la tête des directions régionales aux affaires culturelles (Drac), quatre femmes sont aussi nommées, chargées de révéler, promouvoir, subventionner des talents… essentiellement masculins, à en croire les chiffres de l’Observatoire de l’égalité entre femmes et hommes dans la culture. Des femmes seront donc mises dans l’ombre au service d’hommes dans la lumière. Les stéréotypes, dans les milieux de l’art, ont des dents de fer, ils broient l’espoir de laisser émerger d’immenses talents relégués à leur genre.

Les chiffres sont têtus, et nous ne pouvons rester muettes, quand seuls 33% des établissements culturels et 16% des centres chorégraphiques nationaux (CCN) sont dirigés par des femmes, quand 69% des subventions de l’Etat aux œuvres de théâtre vont à des hommes. A la tête des 100 plus grandes entreprises culturelles : 91 hommes et neuf femmes en 2020, plus bas qu’en 2019, 2018, 2017… Et à la direction des dix plus hauts lieux du spectacle vivant : une femme en 2020… contre deux en 2019 (1). (...)

Des voix s’élèvent pourtant pour renverser l’ordre établi. L’association HF œuvre depuis 2009 à promouvoir l’égalité homme/femme dans la culture et l’art, mais reçoit en retour des déclarations de principes suivies de peu d’effets.

Faut-il donc, encore, rappeler combien de fois, nous, metteuses en scène, réalisatrices, compositrices, nous sommes senties intruses ou au mieux exceptionnelles, dans des milieux où seuls des hommes paraissent avoir accès à la légitimation et la consécration ? Est-il nécessaire de se remémorer combien d’autrices ont vu reléguer l’originalité de leurs textes à la « faiblesse » du sexe ? A combien de comédiennes, conquérantes, fortes, audacieuses a-t-on confiné le talent au seul critère de l’âge, d’une peau habile à prendre la lumière, ou trop sombre pour incarner une jeune première ? (...)

On dresse, impatientes, l’oreille à ceux qui auront le courage de parler et d’agir avec nous, au nom de l’art. Equilibrer la représentation d’artistes femmes et hommes à la direction des lieux culturels, c’est légitimer le travail et le talent d’artistes candidates. C’est cesser de considérer les femmes artistes au mieux comme des exceptions, au pire, comme des intruses. C’est démocratiser la culture et diversifier les publics, par l’opportunité de programmations singulièrement à l’écoute de jeunes talents féminins et divers.

Que défendront les élu·es demain ? Les petits intérêts entre amis ou le rayonnement culturel de notre pays ? (...)

Nous demandons aux futur·es élu·es régionaux et départementaux de mettre en œuvre les principes affirmés mais peu appliqués de l’Etat. Ils en ont les outils, en premier lieu démocratiques (...)