
Un important incendie a ravagé l’incinérateur de Fos durant le week-end. Aucun problème de santé, affirme la préfecture, qui ne répond cependant pas aux questions. L’incendie a très vraisemblablement relâché un panache de dioxines. Il pourrait en tout cas relancer la questions de la gestion des déchets à Marseille.
On l’appelle "l’incinérateur", à cause des polémiques qui ont précédé sa construction, mais il s’agit en fait d’un énorme complexe avec gare de triage, situé à Fos, dans les Bouches-du-Rhône, pile devant la mer.
Là, depuis 2011, arrivent tous les jours des dizaines de wagons contenant mille tonnes d’ordures non triées, la poubelle résiduelle comme on dit, d’un million d’habitants de dix-huit communes, dont Marseille : un kg pour chacun d’entre eux.
Comme tous ses pareils, le four récent porte un nom élaboré par un service de marketing, Everé. Everé se distingue, nous apprend Internet : en plus de brûler les déchets et de les trier pour recycler les métaux et plastiques, on y fermentait les reliefs de cuisine, pour produire du biogaz et du compost.
Dans la nuit de vendredi 1er novembre à samedi, Everé a flambé, et selon la Dreal (Direction Régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement), autrement dit la Préfecture, le feu couvait encore, dans deux fosses, dimanche soir. Impossible d’en savoir plus de ce côté. Aucun journaliste n’a pu visiter le site ni le photographier : la direction passe son temps en Préfecture et l’ouvrière qui répond au standard, lundi soir, constate seulement que les pompiers sont encore là.
Il s’agit de pompiers marins, en principe bien équipés face aux feux chimiques. Le préfet a demandé à l’agence locale Air PACA, de surveiller les polluants atmosphériques à proximité du site : dioxyde d’azote, dioxyde de soufre, ozone et particules PM 10 (voir encadré ci-dessous). L’agence n’a constaté aucune augmentation ; et le préfet de s’en féliciter pour les riverains. Pas un mot sur les dioxines, ni les métaux toxiques. Mais la volonté de surveiller les sédiments marins et les moules qui filtrent l’eau pour se nourrir, en retenant les corpuscules, laisse penser que le souci existe, bien qu’on n’en dise rien. Jusqu’à présent le vent a soufflé vers la mer (mistral) et un peu vers la Crau.
Reporterre a voulu en savoir plus. Nous avons été dans l’impossibilité de poser des questions sur les pollutions causées par l’incendie : sur six attaché-e-s de presse contacté-e-s (Dreal, préfecture de région, préfecture des Bouches-du-Rhône), deux seulement ont répondu, et pour botter en touche. (...)
Comme tout composé chloré, les dioxines s’accumulent dans les graisses, en se concentrant, le long de la chaine alimentaire. L’une d’entre elles est le produit le plus cancérigène connu, agissant au pico gramme (milliardième de gramme), surtout pour certains profils génétiques, et le risque est avéré, autour des incinérateurs anciens.
On ne sait pas ce qui a déclenché le feu à Fos. (...)
Cet accident industriel pourrait permettre de reposer la question de la gestion des déchets. Reporterre renvoyait dès samedi vers l’analyse d’Objectif Transition : l’association pense que ce sera l’occasion de réfléchir sur la réduction des déchets et leur tri efficace, avant les élections municipales du printemps. Quant à François-Michel Lambert, seul député EELV (Europe écologie les Verts) de la région, il lance un flamboyant "Incinérons l’incinérateur !".