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Témoignage Chrétien

15 ans, étranger, sans famille...

dimanche 28 juin 2015

En France, les principes de l’aide sociale à l’enfance (ASE) sont clairs : protection et assistance sont accordées sans distinction d’origine à tout mineur en danger. Et, depuis 1984, ce sont les conseils généraux qui ont la responsabilité de cette aide. Des dizaines de milliers d’enfants sont ainsi pris en charge chaque année jusqu’à leur majorité : hébergement, scolarisation, aide sociale…

Au début des années 2000, ce système bien rodé bute pourtant sur une nouvelle réalité. Instabilité géopolitique et mondialisation sont passées par là. Aux portes de l’ASE se présentent désormais des enfants ou adolescents venus tout seuls en France.

Ils sont du Sri Lanka, d’Afghanistan, de Guinée, de République démocratique du Congo, de Roumanie, du Kosovo… Ils fuient parfois un pays en guerre. Ils essaient de rejoindre un parent ou un ami. Certains sont victimes de traite. D’autres demandent n France, les principes de l’aide sociale à l’enfance (ASE) sont clairs : protection et assistance sont accordées sans distinction d’origine à tout mineur en danger. Et, depuis 1984, ce sont les conseils généraux qui ont la responsabilité de cette aide. Des dizaines de milliers d’enfants sont ainsi pris en charge chaque année jusqu’à leur majorité : hébergement, scolarisation, aide sociale…

Pour comprendre le phénomène, la République française s’empresse de leur coller un acronyme : ce sera MIE (« mineurs étrangers isolés »). Ils n’ont pourtant pas de statut juridique particulier. Selon la loi, en accord avec la Convention internationale des droits de l’enfant (CIDE), ils doivent être protégés au même titre que n’importe quel autre enfant de nationalité française. Alors, les centres d’hébergement, principalement en région parisienne, premier lieu d’arrivée et de demande de protection, les prennent naturellement en charge. Avec souvent à la clé une bonne intégration et une entrée dans la vie professionnelle. Les travailleurs sociaux font l’éloge de ces jeunes, qui sont souvent très motivés, et vantent les bénéfices de la mixité. (...)

Pourtant, depuis 2007-2008, de vraies crispations se produisent. À l’instar de tous les mouvements migratoires sur tous les continents, le nombre de MIE a fortement augmenté. Combien sont-ils alors ? 8000 à 9000 sur le territoire, surtout en Île-de-France. Les services de l’ASE commencent à être débordés. Le temps manque. Alors la suspicion s’installe : il s’agit de faire le tri. Certains exilés ou réfugiés mentent sur leur âge pour bénéficier d’une prise en charge : on en profite pour mettre en doute la parole de tous les autres. Des grands principes des textes à la pratique, un fossé se creuse et ne cesse de grandir. L’heure n’est plus vraiment à l’accueil et au partage.

Un test osseux controversé

C’est l’évaluation de la situation de chaque mineur – une étape fondamentale – qui en fait les frais. À Paris, la Permanence d’accueil et d’orientation des mineurs isolés étrangers (Paomie) est confiée par délégation à l’association France – Terre d’asile. Le rôle de la Paomie est d’évaluer la situation de chacun afin de s’assurer de sa minorité et de son isolement et de fournir une première « mise à l’abri », c’est-à-dire un hébergement provisoire de cinq jours, en attendant qu’une véritable prise en charge soit ou non décidée.

Mais la Paomie suscite les critiques de très nombreuses associations : délai de trois mois avant le premier entretien, évaluation bâclée. Les tests osseux, pratiqués depuis le milieu des années 2000 et censés être une aide dérogatoire à la décision dans les cas les plus incertains, deviennent systématiques. Or, ils ont suscité les réserves du Comité consultatif national d’éthique de l’Académie nationale de médecine, du Défenseur des droits ou encore de la Commission nationale consultative des droits de l’homme.

Un symptôme d’impuissance des autorités et de mépris pour ces jeunes selon Guillaume Lardanchet, directeur de « Hors la rue », une association qui accueille des jeunes mineurs étrangers en errance (...)

"Il y a une crispation autour de ces jeunes qui n’est pas rationnelle, abonde Renaud Mandel de l’Association de défense des mineurs isolés étrangers (ADMIE). Comment ne pas y voir les traces d’une certaine xénophobie que l’on voit à l’œuvre partout ailleurs ? » Car les chiffres sont éloquents. Le nombre de mineurs isolés étrangers en France, tout comme ceux pris en charge par l’ASE, est stable depuis cinq ans. Sur 8000 à 9000 MIE, seuls quelques 3500 sont pris en charge. 6 % du total des bénéficiaires de l’ASE. Quel rôle veut-on faire jouer à ces mineurs ? La mobilisation permettra peut-être d’inverser la tendance.

Douze mille personnes, dont de très nombreux médecins alarmés de voir leur science ainsi instrumentalisée, ont déjà signé une pétition demandant l’arrêt des tests osseux. Pour l’instant, en vain : le 12 mai 2015, un amendement visant à les interdire a été repoussé à l’Assemblée nationale. Le Sénat sera-t-il plus sensible aux MIE ?


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