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France24/AFP
L’évacuation de la Gaîté lyrique à Paris ordonnée, des soutiens aux jeunes migrants rassemblés
#Gaitelyrique #MNA #migrants #immigration #hebergement #solidarite
Article mis en ligne le 18 mars 2025

Le préfet de police de Paris a pris un arrêté ordonnant l’évacuation "avant mardi" de la Gaîté lyrique, occupée depuis le 10 décembre par des centaines de jeunes migrants. Des dizaines de personnes se sont rassemblées lundi soir devant la salle de spectacle parisienne pour dénoncer une décision "honteuse".

"La honte à ce pouvoir qui fait la guerre aux mineurs isolés !" Quelques dizaines de personnes, dont plusieurs élus de gauche, ont manifesté lundi 17 mars au soir devant la Gaîté lyrique, lieu culturel parisien occupé depuis trois mois par des centaines de jeunes migrants. La raison de leur colère : la préfecture de police a ordonné d’évacuer le lieu d’ici ce mardi.

"On ne partira pas !", chante au mégaphone l’un des membres du collectif qui a appelé à manifester, devant le théâtre flanqué d’un drap noir sur lequel est écrit "Gaité lyrique occupée, 400 vies en danger, 80 emplois menacés", a constaté une journaliste de l’AFP. (...)

"Ce qui m’inquiète à titre personnel c’est que, dans le contexte de cabale sur les médias d’extrême droite, il y ait une dispersion anarchique et des ratonnades et que des groupes de gamins se fassent agressés", craint Simon, membre de la CGT du centre d’action sociale de la ville de Paris, qui préfère taire son patronyme.

Parmi les soutiens, figuraient des membres des formations Révolution permanente, du NPA, Sud Solidaires, Snes-FSU. Quelques élus de gauche étaient également présents : les députés Pouria Amirshahi et Danielle Simonet, l’adjoint à la maire David Belliard, la sénatrice Anne Souyris... (...)

"Pour ceux qui le souhaitent, il y aura des hébergements qui seront proposés, comme nous le faisons à chaque fois, et leur situation administrative sera évidemment examinée", a précisé le préfet sur France 5 durant l’émission C’ à vous lundi soir.
Des mineurs de retour dans la rue

Selon des mineurs interrogés par l’AFP, plusieurs d’entre eux ont déjà quitté les lieux, "ceux qui ont un peu de parents ou des connaissances", a expliqué, "moral à terre", Mohamed Sangare, l’un des occupants, originaire de Côte d’Ivoire, depuis huit mois sur le territoire français et toujours en attente de "nouvelles de son dossier".

"La rue, c’est très difficile", témoigne-t-il. À la Gaité, "on se sent mieux, on est au moins abrité du froid." (...)

Dans un communiqué, le collectif fait valoir que "l’État ne propose que des places temporaires et en régions". "La solution n’est pas de nous déplacer ailleurs", poursuit-il. "Nous serons près de 500 jeunes à être remis à la rue cette nuit. La honte !"
La mairie de Paris accusée de "complicité"

Dans cette affaire, le collectif estime que la mairie "est complice" de cette "expulsion sans solution" de la part, selon ses termes, d’un "État raciste". (...)

Pour la mairie, il s’agit d’"une décision unilatérale de l’État". "L’hébergement d’urgence relève des compétences et des moyens de l’État et nous demandons des solutions dignes et pérennes pour tous les jeunes de la Gaîté lyrique et pour ceux qui sont dans les lieux municipaux ou dans les rues de Paris", a poursuivi Léa Filoche, adjointe à la maire de Paris, en charge notamment de l’hébergement d’urgence, interrogée par l’AFP.

"Qu’il n’y ait pas de méprise, nous ne sommes pas, en tant que propriétaires, dans l’idée de récupérer ce lieu. On prend acte de l’arrêté de la préfecture de police et on souhaite que l’État leur propose des places d’hébergement", a insisté le premier adjoint Patrick Bloche, interrogé par l’AFP.

Peu avant 22 heures, près d’une centaine de personnes restaient mobilisées devant le théâtre malgré le froid piquant, dans une ambiance festive, au son d’une petite fanfare improvisée, lançant slogans antifascistes et mots de soutien aux jeunes occupants, a constaté la journaliste de l’AFP. Quelques personnes munies de sacs remplis d’affaires restaient près de l’entrée.

Lire aussi :

 (La Cimade)
Des jeunes en danger

Une prise en charge défaillante

La protection des personnes mineures se fonde sur celle de l’enfance en danger, prévue dans le système français de protection de l’enfance. Le simple fait d’être isolé, sans parent ou représentant légal sur le territoire, place l’enfant en situation de danger.

Si les textes existants prévoient une protection de ces jeunes, la réalité est toute autre et l’on constate de nombreux dysfonctionnements : jeunes en danger, arrivant en France, celles et ceux appelés « mineurs isolés étrangers » (MIE) sont exclu·e·s du système de la protection de l’enfance. (...)

Un processus d’évaluation pas fiable

L’évaluation de la minorité et de l’isolement de l’enfant est marquée par de nombreux dysfonctionnements. Lorsque le jeune possède des documents d’identité, leur authenticité est trop souvent remise en cause, et quand les documents ne sont pas contestés, on doute qu’ils appartiennent réellement à celui ou celle qui les présente.

L’évaluation sociale est souvent faite dans des conditions ne permettant pas un examen adéquat (...)

Un accompagnement limité

Et lorsque le jeune est finalement reconnu mineur, sa prise en charge peut poser question : pas de suivi éducatif, pas d’accompagnement vers la scolarisation ou un contrat d’apprentissage, difficulté d’obtenir un hébergement décent, et bien entendu, pas d’accompagnement administratif en vue d’une demande de régularisation à l’approche de sa majorité. (...)

Une proposition de transfert de compétence inquiétante

Conformément à la Convention internationale des droits de l’enfant, au droit européen et au droit national, l’accueil et la prise en charge de ces mineur·es isolé·es sur le territoire français sont obligatoires. En France, l’accueil, l’évaluation (de la minorité et de l’isolement du mineur) et la prise en charge des MIE sont assurés principalement par les conseils départementaux, compétents en matière de protection de l’enfance selon le code de l’action sociale et des familles (CASF).

Par absence de volonté politique, les collectivités concernées peinent à assumer leurs missions et rechignent régulièrement à allouer les moyens suffisants au dispositif de protection de l’enfance, notamment lorsque les enfants à protéger sont étrangers. (...)

Des propositions pour une véritable protection des jeunes en danger

La protection de l’enfance est de la responsabilité des conseils départementaux en charge donc d’assurer la protection, le suivi et l’accompagnement de ces enfants isolés.

La Cimade fait pourtant un constat terrifiant : de nombreux enfants isolé·e·s ne sont pas protégé·e·s : certain·e·s dorment dehors, d’autres subissent des évaluations peu protectrices de leurs besoins et souvent à charge, et quand ils et elles sont confié·e·s à l’aide sociale à l’enfance, leur accompagnement est parfois défaillant. A 18 ans, ils et elles se retrouvent souvent mis à la porte, souvent avec une obligation de quitter le territoire.

Cette situation dramatique ne peut plus durer. La Cimade formule des propositions pour permettre une autre politique, en imaginant des mesures concrètes et efficaces pour permettre à chacun de ces enfants étrangers en danger d’être protégé·e·s dans un cadre adapté à leurs besoins. (...)

Une régularisation kafkaïenne (...)

En attendant l’amélioration des politiques publiques, ces jeunes en danger dorment dehors, sont présumés majeur·e·s et ne reçoivent pas la protection qui leur est pourtant due.