
Le gouvernement et les autorités locales, s’appuyant sur la pseudo-concertation conduite dans le cadre d’un "projet de territoire", auquel ont participé, comme en Poitou Charentes, des organisations de la société civile revendiquant leur "réformisme", s’apprêtent à passer en force pour relancer un projet de nouveau barrage à Sivens. D’autres représentants de la société civile s’organisent pour y faire face, en élaborant pour commencer un argumentaire qui démontre l’inanité de ce nouveau projet.
"Un nouveau projet retenue de 1Million de m³ semble s’annoncer, ce qui serait presque aussi absurde que le projet initial de 1 Million et demi de m³.
Les syndicats agricoles majoritaires, la chambre d’Agriculture, le Conseil départemental, la maire de la commune de Lisle, Maryline Lherm, poussent pour un ouvrage de ce type et de cette dimension. La canicule de cette année 2019 est outrageusement instrumentalisée dans cette guerre des idées avec un discours simpliste : « Dans la rivière il y a beaucoup d’eau en hiver, et de moins en moins en été. Pour aider les agriculteurs, il faudrait donc une retenue pour stocker l’eau quand elle est disponible, afin de la restituer en été quand il en manque. »
De même, le ministre de l’Agriculture, Didier Guillaume, a-t-il envoyé au début de l’été 2019 une instruction à tous les départements « pour autoriser la construction de retenues d’eau à multi-usages qui doivent permettre l’irrigation de l’agriculture. »
Mais rien n’est encore décidé.
L’opposition au premier barrage, ne demande qu’à être réactivée, et même amplifiée. (...)
Les raisons de dire non à une retenue à Sivens
1° Argument technique : retenues et barrages aggravent la pénurie d’eau.
En cas de sécheresses prolongées ou répétées, les retenues et barrages accentuent le manque d’eau. Ainsi que l’a établi, notamment, à l’instar de nombreux chercheurs, Florence Habets, hydrométéorologue au CNRS. (...)
De plus dans le contexte prévisible de raréfaction des débits et d’augmentation des températures, l’hypothèse la plus plausible est que la retenue à Sivens aurait de plus en plus de mal à se remplir.
2° Argument politique : les élus ont commis une erreur en 2013, qu’ils ne doivent pas répéter aujourd’hui
Dans le contexte de réchauffement climatique, les électeurs sont de plus en plus sensibles aux mesures concrètement adoptées pour répondre à l’urgence climatique .
Suite à l’avis défavorable de l’Europe, au rapport négatif des experts nommés en 2014 par la ministre de l’Environnement, et, bien sûr, suite à l’action des opposants, le tribunal administratif de Toulouse avait condamné en 2016 le projet initial avec des arguments de fond, toujours valables pour ce nouveau projet : surdimensionné, trop coûteux, bénéficiant à trop peu de personnes, et sans que les projets alternatifs aient été sérieusement étudiés. (...)
3° Argument écologique : c’est un projet inadapté au contexte actuel
Le changement climatique se traduit par des phénomènes météorologiques extrêmes : pluies torrentielles, inondations brutales, sécheresses de plus en plus longues et répétées. (...)
les cultures gourmandes en eau, et l’irrigation sont à revoir à la baisse.
De même, il faut préserver les forêts et les zones humides, qui favorisent le maintien de la nappe phréatique et la biodiversité, (...)
4° Argument de la légalité : les besoins en eau ne sont pas chiffrés (...)
5° Argument économique et financier : argent public pour intérêts privés.
La retenue de Sivens serait financée par de l’argent public, lequel a vocation à servir l’intérêt commun.
En 2014 les experts ont été dans l’incapacité d’évaluer les besoins des irrigants faute d’information vérifiable, la quarantaine d’agriculteurs interrogés ayant refusé à l’époque de se prononcer sur le tarif d’achat d’eau qu’ils seraient disposés à valider. Aujourd’hui, on ne s’explique pas le passage de 40 irrigants potentiels à 4 ; un autre, non déclaré, bientôt à la retraite, envisage la vente de ses terres et compte les valoriser en garantissant leur irrigation.
Pour tous ces exploitants, l’irrigation permettrait de décrocher de bons contrats avec les entreprises de l’agrobusiness. L’essentiel des bénéfices de la retenue iraient à ces mêmes entreprises.
Sans modification des pratiques agricoles, les cours d’eau s’assécheraient et le pompage dans la nappe phréatique deviendrait la norme. C’est alors qu’il y aurait concurrence entre l’eau pour irriguer et l’eau à boire : l’eau potable se raréfierait, serait rationnée, coûterait plus cher à chacun d’entre nous."