
Destructions de quartiers, créations de kilomètres carrés de bureaux et offensives de gentrification : l’opération politico-militaire nommée Euroméditerranée et ses effets collatéraux espèrent rendre Marseille bankable en lui dessinant un nouveau visage. Courant janvier, d’autres visages, ceux des habitants d’un quartier populaire, stigmatisés à l’envi, se sont manifestés pour poser leurs conditions aux promoteurs. Respect !
(...)« On habite là et on est presque tous au chômage. On voit devant nous un énorme chantier, et il n’y a personne d’ici qui y travaille. Ce n’est pas normal ! », s’enflamme Aburata [1], père de famille, habitant de la cité Bellevue. Il est un de ceux qui, avec plusieurs dizaines d’autres, ont entrepris de bloquer le chantier à l’aube du 13 janvier. Un conteneur à verre devant le portail, des chaines cadenassées condamnant les accès : le promoteur avait été prévenu. Le 8 janvier, des jeunes du parc Bellevue, soutenu par le Collectif des quartiers populaires de Marseille (CQPM), avait rendu publique une « lettre ouverte » se concluant par un appel à un rendez-vous pour la semaine suivante. « Parfois les médias […] nous décrivent comme des personnes ayant fait un choix de vie négatif. Le choix de la facilité, de l’argent malhonnête, ou de l’oisiveté. Certains politiques nous désignent à la vindicte populaire et font de nous des parasites, des moins-que-rien, niant nos droits, nos aspirations tout en se foutant de notre humanité. Car oui, et n’en déplaise à certains, nous sommes des jeunes d’un quartier populaire de Marseille et cela nous le revendiquons comme une fierté et non comme un stigmate ! […] Plus qu’ailleurs nous souffrons de ce manque de considération, de cette relégation perpétuelle qui finit par se transformer en réclusion à ciel ouvert. […] Le parc Bellevue est bien connu des Marseillais, et il partage avec de nombreux autres quartiers le fait d’être devenu le symbole de l’inégalité en France (...)